Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/329

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aventureuse. Mais la chambre était glacée. Annette se tourmentait, maintenant qu’elle n’agissait plus. La fatigue la disposait à ruminer, ce qui pouvait faire manquer l’expédition : la fuite de Franz ne serait-elle pas aussitôt signalée ? Arriverait-il à temps, au passage du train ? Elle-même, tout à l’heure, avec ses deux billets, la laisserait-on passer ?… Paix là ! Tout à l’heure, on verra… À chaque heure son action ! Silence à la pensée !… Elle se rappela qu’elle ne s’était pas munie de provisions de bouche : Franz arriverait, exténué… Elle ressortit, pour quelques instants.

C’était quatre heures passées. Le lumignon du jour s’éteignait. Un souffle humide et mou pesait sur la Ville. On était transpercé par une petite pluie égale et sans arrêt, qui sortait de la chaussée et des murs des maisons, comme du ciel invisible. Paris était englouti sous le brouillard, comme un dormeur sous ses couvertures. On ne voyait pas à quatre pas. Du voile ruisselant émergeaient brusquement les passants qu’on croisait, et qui replongeaient sous la nuée. Pour qui ne voulait pas être vu, c’était une sécurité. C’était aussi un piège…

Et soudain, le carreau de brume fut crevé par une jeune tête ébahie, par un cri ; et, si vite que le cœur d’Annette les eût reconnus, une main plus