Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t1.djvu/269

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

membres. C’est de ce deuxieme rapport que naissent les loix civiles.

On peut considérer une troisieme sorte de relation entre l’homme & la loi, savoir celle de la désobéissance à la peine, & celle-ci donne lieu à l’établissement des loix criminelles, qui dans le fond sont moins une espece particuliere de loix, que la sanction de toutes les autres.

À ces trois sortes de loix, il s’en joint une quatrieme, la plus importante de toutes ; qui ne se grave ni sur le marbre, ni sur l’airain, mais dans les cœurs des citoyens ; qui fait la véritable constitution de l’État ; qui prend tous les jours de nouvelles forces ; qui, lorsque les autres loix vieillissent ou s’éteignent, les ranime ou les supplée, conserve un peuple dans l’esprit de son institution, & substitue insensiblement la force de l’habitude à celle de l’autorité. Je parle des mœurs, des coutumes, & sur-tout de l’opinion ; partie inconnue à nos politiques, mais de laquelle dépend le succès de toutes les autres : partie dont le grand Législateur s’occupe en secret, tandis qu’il paroit se borner à des réglemens particuliers qui ne sont que le ceintre de la voûte, dont les mœurs, plus lentes à naitre, forment enfin l’inébranlable Clef.

Entre ces diverses Classes, les loix politiques, qui constituent la forme du Gouvernement, sont la seule relative à mon sujet.