Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t1.djvu/520

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cet objet. Cette milice coûtera peu de chose à la République, sera toujours prête à la servir & la servira bien, parce qu’enfin l’on défend toujours mieux son propre bien que celui d’autrui.

Monsieur le Comte Wielhorski propose de lever un régiment par Palatinat, & de l’entretenir toujours sur pied. Ceci suppose qu’on licencieroit l’armée de la Couronne ou du moins l’infanterie ; car je crois que l’entretien de ces trente-trois régimens surchargeroit trop la République si elle avoit outre cela l’armée de la Couronne à payer. Ce changement auroit son utilité & me paroît facile à faire ; mais il peut devenir onéreux encore & l’on préviendra difficilement les abus. Je ne serois pas d’avis d’éparpiller les soldats pour maintenir l’ordre dans les bourgs & villages ; cela seroit pour eux une mauvaise discipline. Les soldats, sur-tout ceux qui sont tels par métier, ne doivent jamais être livrés seuls à leur propre conduite, & bien moins chargés de quelque inspection sur propre les citoyens. Ils doivent toujours marcher & séjourner en Corps : toujours subordonnés & surveillés, ils ne doivent être que des instrumens aveugles dans les mains de leurs officiers. De quelque petite inspection qu’on les chargeât, il en résulteroit des violences des vexations des abus sans nombre ; les soldats & les habitante deviendroient ennemis les uns des autres ; c’est un malheur attaché par-tout aux troupes réglées : ces régimens toujours subsistantes en prendroient l’esprit, & jamais cet esprit n’est favorable à la liberté. La République Romaine fut détruite par ses légions quand l’éloignement de ses conquêtes la força d’en avoir toujours sur pied. Encore une fois