Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t6.djvu/221

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trembler l’homme le plus juste & le plus ferme, qui a le malheur de vivre sous dé pareils Magistrats.

L’Auteur de la profession de foi fait des objections tant sur l’utilité que sur la réalité des miracles, mais ces objections ne sont point des négations. Voici là-dessus ce qu’il dit de plus fort : "C’est l’ordre inaltérable de la nature qui montre le mieux l’Etre suprême. S’il arrivoit beaucoup d’exceptions, je ne saurois plus qu’en penser ; & pour moi je crois trop en Dieu pour croire à tant de miracles si peu dignes de lui. "

Or, je vous prie, qu’est-ce que cela dit ? Qu’une trop grande multitude de miracles les rendroit suspects à l’Auteur ; qu’il n’admet point indistinctement toute sorte de miracles, & que sa foi en Dieu lui fait rejetter tous ceux qui ne sont pas dignes de Dieu. Quoi donc ! celui qui n’admet pas tous les miracles, rejette-t-il tous les miracles ? & faut-il croire à tous ceux de la Légende, pour croire l’Ascension de Christ ?

Pour comble. Loin que les doutes contenus dans cette seconde partie de la profession de foi puissent être pris pour des négations, les négations, au contraire, qu’elle petit contenir ne doivent être prises que pour des doutes. C’est la déclaration de l’Auteur, en la commençant, sur les sentimens qu’il va combattre. Ne donnez, dit-il, à mes discours que l’autorité, de la raison. J’ignore si je suis dans l’erreur. Il est difficile, quand on discute, de ne pas prendre quelquefois le ton affirmatif ; mais souvenez-vous qu’ici toutes mes affirmations ne sont que des raisons de douter. *

[* Emile. T. III. p. 131] Peut-on parler plus positivement ?