Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/188

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Comme ils marchoient donc vers Gabaa, les Benjamites firent une sortie par toutes les portes, & tombant sur eux avec plus de fureur que la veille, ils les désirent, & les poursuivirent avec un tel acharnement, que dix-huit mille hommes de que guerre périrent encore ce jour-la dans l’armée d’Israel. Alors tout le peuple vint derechef se prosterner & pleurer devant le Seigneur, & jeûnant jusqu’au soir, ils offrirent des oblations & des sacrifices.. Dieu d’Abraham, disoient-ils en gémissant, ton peuple, épargné tant de fois dans ta juste colere, périra-t-il pour vouloir ôter le mal de son sein ? Puis, s’étant présentes devant l’Arche redoutable, & consultant derechef le Seigneur par la bouche de Phinées fils d’Eléazar, ils lui dirent : marcherons-nous encore contre nos freres, ou laisserons-nous en paix Benjamin ? La voix du Tout-Puissant daigna leur répondre : Marchez, & ne vous fiez plus en votre nombre, mais au Seigneur qui donne &. ôte le courage comme il lui, plaît : Demain je livrerai Benjamin entre vos mains.

À l’instant ils sentent déjà dans leurs cœurs l’effet de cette promesse. Une valeur froide & sure succédant à leur brutale impétuosité les éclaire & les conduit. Ils s’apprêtent posément au combat, & ne s’y. présentent plus en forcenés, mais en hommes sages & braves qui savent vaincre sans fureur, & mourir sans désespoir. Ils cachent des troupes derrière le coteau de Gabaa, & se rangent en bataille avec le reste de leur armée, ils attirent loin de la ville les Benjamites, qui, sur leurs premiers succès, pleins d’une confiance trompeuse sortent plutôt pour les tuer que pour les combattre ; ils poursuivent avec impétuosité l’armée qui cède & recule à dessein devant eux ; ils