Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/44

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encore la corruption dans les cœurs de ses habitants, mais le progrès des Arts, la dissolution des mœurs, & le joug du Macédonien, se suivirent de près; & la Grèce, toujours savante, toujours voluptueuse, & toujours esclave n’éprouva plus dans ses révolutions que des changemens de maîtres. Toute l’éloquence de Démosthène ne put jamais ranimer un corps que le luxe & les Arts avoient énervé.

C’est au tems des Ennius & des Térences que Rome, fondée par un Pâtre, & illustrée par des Laboureurs, commence à dégénérer. Mais après les Ovides, les Catulles, les Martials, & cette foule d’Auteurs obscènes, dont les noms seuls alarment la pudeur, Rome, jadis le Temple de la Vertu, devient le Théâtre du crime, l’opprobre des Nations & le jouet des barbares. Cette Capitale du Monde tombe enfin sous le joug qu’elle avoit imposé à tant de Peuples, & le jour de sa chûte fut la veille de celui où l’on donna à l’un des Citoyens le titre d’Arbitre du bon goût.

Que dirai-je de cette Métropole de l’Empire d’Orient, qui par sa position sembloit devoir l’être du Monde entier, de cet asyle des Sciences & des Arts proscrits du reste de l’Europe, plus peut-être par sagesse que par barbarie. Tout ce que la débauche & la corruption ont de plus honteux; les trahisons, les assassinats & les poisons de plus noir; le concours de tous les crimes de plus atroce : voilà ce qui forme le tissu de l’Histoire de Constantinople; voilà la source pure d’où nous sont émanées les Lumières dont notre siècle se glorifie.

Mais pourquoi chercher dans des temps reculés des preuves d’une vérité dont nous avons sous nos veux des témoignages