Page:Rousseau - Fragments inédits éd. Jansen 1882.djvu/46

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^ 36 Histoire critique de la rédaction des

j’ai publié cet écrit.* (59 b). — Néanmoins cette mauvaise action pesait de nouveau et plus accablante que jamais sur sa conscience, et il ne trouvait de consolation que dans une victoire complète sur sa honte. Ne pensant pouvoir effacer sa faute qu’en l’ex- piant, il résolut de dire, comme cette épouse vertueuse de son Emile tintrépide et barbare dans sa franchise», toutes ses fautes et de faire à l’humanité entière >>sa confession, non sa justifica- tion, s (60)

Ce fut dans ces dispositions d’esprit que Rousseau écrivait à DucLos, le 13 janvier 1765: «J’ai beaucoup à dire, et je dirai tout,* {61) et à M"" de Verdelin , le 25 Mai 1766: »Malheu- reusement j’aurai beaucoup à dire, mais je dirai tout ; nul homme jusqu’ici n’a fait ce que je me propose de faire et je doute qu’un autre en fasse autant après moi,« (63) Dans la nouvelle intro- duction qu’il composa en 1765 pour l’histoire de sa vie, il dé- clare au public: sPeu d’hommes ont fait pis que je ne n’ai fait et jamais homme n’a dit de lui même ce que j’ai à dire de

moi Je serai vrai; je le serai sans réserve: je dirai tout,

le bien, le mal, tout enfin ... J’y dis de moi des choses très- odieuses et dont j’aurais horreur de vouloir m’excuser ... ce sont mes confessions à toute rigueur. Il est juste que ma répu- tation expie le mal que le désir de la conserver m’a fait faire.»: {63) Après s’être infligé cette pénitence héroïque, Rousseau sentit sa conscience déchargée devant Dieu et devant les hommes et sans tarder il se rendit à lui-même ce témoignage: »La persé- cution m’a élevé l’âme. Je sens que l’amour de la vérité m’est devenu cher parcequ’il me coûte. Peut-être ne fut-il d’abord pour moi qu’un système ; il est maintenant ma passion dominante. C’est la plus noble qui puisse entrer dans le cœur de l’homme. J’ose dire qu’elle était faite pour le mien, s (64)

Avec toutes ses fautes Rousseau se trouve non seulement meilleur que les hommes qui, après sa rupture avec eux, ont trahi la confiance de l’amitié et violé le plus saint de tous les pactes ; (65) il a encore une si sûre conscience de sa valeur mo- rale, qu’il écrit à DucLOS , le 13 janvier 1765: s . . le mal offusquera presque toujours (dans ma vie) le bien ; et malgré cela, j’ai peine à croire o^aucun de mes lecteurs ose se dire: Je suis meilleur que ce Ae fut cet kommeAb.." (66) >Mais que chaque lecteur m’imite, demande-t-îl dans l’Introduction mentionnée de

(Sgb) Oiuvres comfl. Lttires icriles di ta Montagne III. 125.

(60) Ib. Con/mioni VIII. 255.

(61) Ib. Ccrrisp. Voyez la note 21.

(62) Rousseau à Mme de Verdelin, Woolton le 25 mai 1766. V. le Journal ÏArtisti 1840.

(63) Félix Bovel, Fragments inédits dis Confessions etc. p. 11. 12. 13.

(64) Frit! Berthoud p. 363 (note de Rousseau trouvée dans un de ses calepins 1765).

(65) Oeuvres comfl. Confusioni VIII. 154. 255.

(66) Voyei la noie 21.