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Histoire critique de la rédaction des confessions

tats des recherches que nous venons d’exposer au lecteur, nous prendrons la liberté de lui communiquer encore notre opinion sur une édition des Confessions qui satisferait aux exigences de la critique et de la science historique. Cette édition commencerait par l’écrit intitulé Mon Portrait (de 1764) avec les fragments y relatifs que nous avons découverts. Cet écrit serait suivi de l’introduction intéressante composée en 1765 et publiée par Félix Bovet. Pour le texte même des Confessions, il va sans dire qu’il faudrait rendre exactement et fidèlement le manuscrit de Moultou, celui-ci représentant la rédaction finale. Cependant, afin que le lecteur puisse connaître toutes les péripéties de la composition de cet ouvrage, l’éditeur y ajouterait en note les variantes du manuscrit de Th. Levasseur, puis celles du manuscrit fragmentaire portant le titre : » Les Confessions de J.-J. Rousseau, contenant le détail des événemens de sa vie etc. «, et enfin celles des esquisses primitives, que nous avons signalées dans les publications de Streckeisen-Moultou, de Bougy, de Villenave, de Fritz Berthoud, et que nous avons enrichies de quelques nouvelles découvertes. Pour ce qui est enfin des notes de Rousseau lui-même, il faudrait distinguer, par l’impression, celles que l’auteur a rédigées en même temps que le texte, de celles qu’il a ajoutées plus tard.

»En me livrant, dit ROUSSEAU dans l’introduction de 1765, à la fois au souvenir de l’impression reçue et au sentiment présent, je peindrai doublement l’état de mon âme, savoir au moment où l’événement m’est arrivé et au moment où je l’ai décrit mon style inégal et naturel, tantôt rapide et tantôt diffus, tantôt sage et tantôt fou, tantôt grave et tantôt gai, fera lui même partie de mon histoire.< En écrivant ces paroles, l’auteur ne pensait qu’à une forme unique du texte de l’ouvrage qu’il allait donner au public. Cependant il a fini par nous laisser quatre textes différents : deux rédactions complètes, une rédaction fragmentaire et nombre de premiers jets. Une édition comprenant tous ces matériaux nous offrirait un objet précieux de comparaison, nous ferait connaître l’art de narrer et d’écrire de l’auteur » le plus éloquent de son siècle « ; une pareille édition nous ferait connaître aussi JEAN- JACQUES ROUSSEAU beaucoup plus intimement qu’il ne s’en doutait lui-même, et elle accomplirait au delà de sa propre attente son but sublime de donner selon ses paroles » un ouvrage unique et utile, lequel peut servir de première pièce de comparaison pour l’étude des hommes qui certainement est encore à com- mencer.« Imprimerie Ducale à Altenbourg.