Page:Rousseau - La Monongahéla, 1890.djvu/44

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
46
La Monongahéla

cheveux noirs, l’autre un peu de rose de son teint, celle-ci quelques rayons de sa gaité, celle-là une part de sa sensibilité. Bref, la Française d’abord fort pauvre, fort obscure et très-effacée, se trouva en un instant par ce partage beaucoup plus riche et beaucoup mieux dotée qu’aucune de ses compagnes.

« Quant à la feu bleue, elle était déjà remontée au ciel, après avoir envoyé à ses filles un baiser de sa main rose. »[1]

— Bravo ! délicieux ! s’écrièrent les auditeurs en applaudissant sans réserve.

— Eh bien ! que dites-vous de cela, impie, fit madame de Vaudreuil en s’adressant à M. de Sabrevois.

— Je dis… je dis, madame la marquise, que l’auteur a passé sous silence des sujets fort intéressants.

— Quels sujets ?

— Mais les femmes de nos sauvages, par exemple !

— Consolez-vous, mon cher de Sabrevois, vous allez les revoir dans quelques jours, ces sauvages que vous aimez tant, fit la voix grave d’un nouveau personnage qui entrait en ce moment dans le cercle.

C’était le gouverneur portant à la main un large pli. Les jeunes filles se levèrent à son approche et tous les hommes s’inclinèrent avec respect.

  1. Imité de L. Gozlan.