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mence à mettre à l’herbe : ainsi, ces animaux se trouvent moins dérangés par le vert. Quand on n’a pas à sa proximité un pâturage médiocre pour déposer les bœufs arrivans, et les accoutumer au vert, il faut les retirer de la pâture une partie du jour, et leur donner des alimens secs, soit à l’étable ou dans un enclos.

Lorsque l’engraissement est déjà commencé, on les met dans des pâturages plus abondans pour les faire tourner plus vite à la graisse.

Cette succession prévient aussi le pissement de sang et les météorisations.

Les pâturages où l’herbe est délicate, fine, savoureuse, conviennent aux animaux d’une taille moyenne, et ils leur donnent une graisse plus exquise : mais, si on les en ôte pour les mettre tout à coup dans des endroits où l’herbe soit plus abondante, plus aqueuse, ils éprouvent des diarrhées qui retardent la graisse, ou même qui les font dépérir. La même chose arrive aux animaux accoutumés aux pâturages abondans, s’il survient des pluies longues, continuelles ou répétées qui les mouillent, ainsi que les plantes.

Les bœufs et les vaches restent à l’étable nuit et jour, depuis le commencement du printemps jusqu’aux gelées blanches. La nourriture dans les pâturages se continue même en hiver : les bœufs sont de même dehors ; ils mangent les herbes qui restent, et quand la neige les leur dérobe, on leur jette du foin, matin et soir ; si le temps devient trop rigoureux, on les rentre à l’étable. Leur engraissement s’achève vers le milieu du printemps suivant ; ils se vendent cher, parce que les bœufs de pouture sont épuisés, et que les nouveaux bœufs d’herbe n’ont pas encore eu le temps d’engraisser.

Les bœufs qu’on a commencé, au printemps, d’engraisser à l’herbe, achèvent leur graisse depuis le commencement de l’automne jusqu’à la fin.

On termine l’engraissement par les pâtures les plus copieuses et de la meilleure qualité, telles que des regains de prés naturels ou artificiels, mais dont on fait usage avec ménagement et précaution. Si l’on manque d’herbe, on peut avoir recours aux graines et aux racines dont nous allons parler ; mais ordinairement chacun n’achète que la quantité de bœufs proportionnée à ce que son pâturage peut comporter.

Les moutons se trouvent très-bien de cette méthode ; leur pâture la plus convenable sont les chaumes, les jachères, les bois, le bord des chemins, les montagnes. Ils passent la nuit à la bergerie. On doit les tenir à l’ombre, de dix heures du matin à trois ou quatre du soir, dans les jours où la chaleur est extrême ; les conduire aux champs de très-grand matin, et les ramener très-tard. En automne, les propriétaires d’herbages en achètent pour achever de les engraisser, et les vendre aux bouchers.

Les animaux engraissés dans les endroits où l’herbe est fine et savoureuse ont la viande plus délicate que celle des animaux engraissés dans les pâturages marécageux et de qualité inférieure, elle se conserve aussi plus longtemps sans s’altérer : elle l’emporte encore beaucoup, pour ces avantages, sur la viande des animaux engraissés au grain. La bouche du roi ne consommoit autrefois que des bœufs engraissés à l’herbe.

2o. Engraissement à l’étable, appelé de pouture. Pour les bœufs, l’engraissement à l’étable commence ordinairement à la Toussaint, après que les terres sont ensemencées. Il a pour objet des animaux achetés exprès ou bien des paires de bœufs de travail qu’on réforme.

On a eu soin d’abord de les fatiguer moins que les autres, et de les nourrir plus abondamment ; puis, on les appareille pour que les voisins ne se fassent pas de tort l’un à l’autre. On saigne ceux en qui on remarque la dureté de la peau, la rigidité des fibres.

On commence toujours par leur donner, le plus longtemps possible, des fourrages verts, tels que les feuilles de choux, de raves, de diverses espèces ; des racines, telles sont les betteraves champêtres, la pomme de terre, les navets, les carottes, les topinambours, les raves : on les coupe par tranches, par morceaux pour éviter les ingurgitations (ou l’arrêt des racines dans l’œsophage.) On tâche de les garantir de la gelée, et on les rejette si elles sont pourries, étant alors plutôt capables de nuire que de servir à l’engraissement. Les racines cuites sont plus efficaces, et ont encore plus de qualité, si on les fait cuire à la vapeur de l’eau bouillante.

Le foin doit être de très-bonne qualité ; celui de relais coupé en été, qui croît autour des bouses, et formé de l’herbe que les animaux ne mangent pas, est moins bon que le foin de première récolte.

On prend la paille la meilleure ; on la hache dans quelques pays ; on fait manger aussi dans quelques endroits les feuilles d’aune, de peuplier, de saule, surtout dans des temps de disette. Le foin, dans bien des lieux, est la base de l’engraissement.

On donne encore avec avantage, dans la