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Bretagne, l’ajonc, jonc marin ou genêt épineux, qu’on hache et qu’on écrase.

Les grains qui servent à l’engrais de pouture, sont le sarrazin, le maïs ou blé de Turquie, l’avoine, l’orge, le seigle, la graine de lin, la son de seigle et de froment bouilli ; les grains crevés, les pois, les petites fèves, les féveroles, etc. Les grains grossièrement moulus se délaient dans l’eau ; on en fait aussi des boules de pâte.

Les châtaignes cuites, et leur eau, sont un très-bon aliment. On donne encore le gland, même aux bœufs ; mais il est plus efficace étant germé : on a remarqué que le marron d’Inde perd son amertume après avoir été lavé à l’eau courante, dans une barrique trouée, ou mieux encore passé à la lessive.

Les marcs de bière, de graine de lin, de colza, de navette, de chènevis, de noix, réduits en pains ou tourteaux dont on a exprimé l’huile, se donnent encore au cochon, au bœuf et au mouton ; on les distribue par portions grosses comme des noisettes ; mais on leur reproche de rendre la chair huileuse.

On donne encore les montans des choux et des navets, la luzerne, le trèfle, le seigle, l’orge, l’avoine en vert : on les coupe douze heures d’avance, on les éparpille sous des hangars, dans les granges, de peur qu’ils ne s’échauffent.

On mêle le vert avec le sec, autant qu’il est possible ; on commence cependant par faire consommer ce qui seroit dans le cas de se gâter. On donne alternativement les alimens de ces deux classes : on distribue quatre à cinq rations par jour, en commençant de cinq à six heures du matin, et en finissant à huit ou neuf heures du soir, de manière qu’il y ait toujours, entre chaque repas, un intervalle de quatre heures environ. On peut s’apercevoir que la ration est suffisante, que le bœuf et le mouton ont assez mangé, lorsque le flanc gauche commence à se soulever ; alors ils se couchent pour se livrer à la rumination. On fait boire les animaux deux fois par jour, quand ils sont nourris au sec ; quand on leur donne l’eau blanche et des fourrages verts, on est dispensé de leur présenter autant d’eau.

Les logemens doivent être tenus dans une grande propreté ; les fumiers enlevés, et la litière faite deux fois par jour ; les bœufs doivent être étrillés et bouchonnés tous les jours, au moins une fois : on les met dehors, dans quelques endroits, pour les faire boire, et on profite de ce moment pour faire la litière.

Le trèfle, la luzerne, les feuilles de choux, celles des navets, donnent à la graisse un goût de rance et une couleur jaunâtre. Le gland, la faine, rendent le lard facile à rancir et à fondre, et difficile à saler. On évite ces inconvéniens, en terminant l’engraissement par les meilleurs grains, par les meilleurs fourrages. On donne même des alimens aromatiques ; on mêle des baies de genièvre aux alimens, pour donner meilleur goût à la chair. Il faut, nous le répétons, prendre garde de produire un relâchement trop considérable, et soutenir suffisamment l’action des organes digestifs. C’est dans cette intention qu’on donne du sel aux animaux ; on le fait prendre, soit en le dissolvant dans l’eau, dont on asperge le foin et la paille, soit en saupoudrant les alimens de sel en grain, ou en suspendant au râtelier une poche pleine de sel que les bœufs lèchent, et d’où le sel transude, étant humecté par la salive : pour les cochons, on met dans les auges des morceaux de fer ; ils s’y oxident ; la rouille s’en détache, et se mêle à la boisson : ce qui produit à peu près le même effet que le sel. Il y a encore des personnes qui, dans la même intention, mêlent du vin à l’eau.

Les animaux engraissés au grain ont ordinairement plus de suif que ceux qui doivent leur graisse à l’herbe ; il est aussi plus compacte, mais ordinairement moins blanc.

Les animaux engraissés au grain se trouvent gras à la fin de l’automne, et approvisionnent les marchés jusqu’au milieu du printemps.

3°. Engraissement des veaux et des agneaux. On donne le lait dans l’engraissement, surtout du cochon, des veaux, des agneaux et des volailles. Il fait la base de l’engraissement des veaux appelés de Pontoise ; on le leur fait boire dans des seaux, et même celui de plusieurs vaches. On y ajoute sur la fin des jaunes d’œufs, des pois cuits, ou réduits en farine ; aux environs de Rouen, on y mêle du pain à chanter ; et, dans le pays de Caux, on met dans chaque seau gros comme un œuf de chaux vive, dans l’intention de faire blanchir la viande.

En les tuant, on les laisse saigner le plus possible ; ils fournissent une chair très-blanche, très-tendre ; on en voit qui pèsent cent vingts livres, à trois mois.

Les agneaux s’engraissent de même avec le lait de leurs mères, et celui des brebis qui ont perdu leurs agneaux. On les tient à la bergerie, on leur donne aussi des substances farineuses délayées dans l’eau. La castration suspend l’engraissement, et l’arrachement du cordon établit une échymose dans les lombes, qui diminue la bonté de la chair. Les marchands connaisseurs rejettent les agneaux châtrés. Ils man-