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dizaines. Il seroit facile de remonter a la série des générations de fils en père, en examinant aux dents l’âge de chaque individu. Cette méthode a ses avantages, sur-tout dans le cas où l’on ne tiendroit pas un registre de son troupeau.

Il est à propos d’avoir un registre sur lequel on inscrit les numéros de chaque individu : c’est là où l’on notera les observations qu’il importe de retrouver au besoin, non seulement celles qui sont relatives à l’accouplement et au croisement des races, mais encore celles qu’on fera pendant le cours des expériences auxquelles on voudra soumettre les animaux. Un cultivateur soigneux, et celui qui cherche à perfectionner son art, notera les vices ou les qualités des animaux, leur état de santé et de maladie, la nature de leurs laines, les bénéfices qu’il en retire, etc. Ou reconnoîtra alors facilement les individus dont il est à propos de se défaire chaque année, ceux qu’il est bon de propager ; l’on obtiendra enfin le but qu’on doit se proposer, celui de perfectionner les races et d’en retirer le plus grand bénéfice possible.

§. XIX. De la tonte. La tonte doit se faire dans le mois de mai, lorsque les froids ou les pluies ne s’y opposent pas. Le printemps et l’été sont les saisons où la laine croît avec le plus de force ; et, si on la laisse alors sur le corps de l’animal, elle profite moins que si elle eût été coupée.

Un autre inconvénient qui résulte du délai de la tonte, c’est que la laine tombe lorsque les animaux ont souffert, ou qu’ils n’ont pas été bien nourris durant la mauvaise saison. Cette chute a lieu sur-tout dans les pays chauds. On a observé en Espagne, que, lorsque quelques circonstances forçoient à retarder d’un mois la tonte des troupeaux, la laine se détachoit de quelques parties du corps de l’animal.

Il en est des laines comme des plantes ; la pousse des unes et des autres est plus vigoureuse lorsqu’elles ont été coupées. On gagneroit même sur la quantité, si l’on faisoit deux tontes annuelles, ainsi que cela se pratique en Espagne dans la province de Galice, et dans quelques parties de l’Italie et du nord de l’Europe. On tond les moutons jusqu’à trois fois par an dans la Norwège. On a adopté cet usage, par la raison qu’on a reconnu que le produit étoit alors bien plus considérable que lorsqu’on ne fait qu’une tonte. Mais cette pratique ne peut avoir lieu que pour les races à laine longue, et lorsqu’il s’agit de fabriquer certaines étoffes.

On a essayé à Rambouillet de laisser la toison à quelques mérinos pendant deux années consécutives. Cette pratique présente trop d’inconvéniens pour être appliquée avec avantage sur des troupeaux entiers, ainsi que nous l’avons exposé dans notre Histoire de l’introduction des moutons à laine fine d’Espagne. Le même essai a été tenté en Estramadure, et il a été abandonné par la raison qu’une portion de laine se perdoit dans les pâturages. Il peut arriver aussi que, dans cet état, les animaux fassent une plus grande consommation de fourrage, que leur engrais soit plus difficile et plus dispendieux ; on doit enfin calculer l’intérêt de l’argent qui rentreroit dès la première année, si l’ou ne différoit pas la tonte.

Il faut tondre les agneaux dès la première année de leur naissance. On obtient, en faisant deux coupes aux deux premières années, une laine de qualité meilleure et plus homogène, que lorsqu’on diffère la tonte. La laine de deux ans est inégale, et elle casse facilement.

On a l’habitude, dans presque toute l’Espagne, de faire suer les moutons avant que de les soumettre à la tonte. On les enferme pour cela dans des cours, ou dans des bâtimens où ils se trouvent pressés les uns contre les autres sans