Page:Ruskin - Sésame et les lys.djvu/208

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Touraine et dans les diètes germaniques. Elles avaient leurs douces sonneries de cloches qui perçaient les forêts à bien des lieues le matin et le soir et chacune avait sa rêveuse légende.

« Assez peu nombreuses et assez disséminées étaient ces abbayes, pour ne troubler à aucun degré la profonde solitude de la région ; pourtant assez nombreuses pour déployer un réseau ou une tente de chrétienne sainteté sur ce qui eût paru sans cela un désert païen[1]. »

Maintenant, vous ne pouvez pas, il est vrai, avoir ici, en Angleterre, des bois de dix-huit milles de rayon du centre à la lisière ; mais vous pourriez peut-être tout de même garder une fée ou deux pour vos enfants, si vous aviez envie d’en garder. Mais en avez-vous réellement envie ? Supposez que vous eussiez chacun, derrière votre maison, un jardin assez grand pour y faire jouer vos enfants, avec juste assez de pelouse pour avoir la place de courir — pas davantage ; supposez que vous ne puissiez pas changer d’habitation, mais que, si vous le vouliez, vous puissiez doubler votre revenu, ou le quadrupler, en creusant un puits à charbon au milieu de la pelouse, et en convertissant les corbeilles de fleurs en monceaux de coke. Le feriez-vous ? J’espère que non. Je peux vous dire vous auriez grand tort si vous le faisiez, même si cela augmentait votre revenu dans la proportion quatre à soixante.

83. Et pourtant c’est cela que vous

  1. « Jeanne d’Arc », d’après l’histoire de France de M. Michelet. Œuvres de Quincey, vol. III, p. 217. (Note de l’auteur.)