Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/140

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vivent et dont les noms sont presque inconnus, n’étaient que de simples ymagiers, auxquels on fournissait le marbre, la pierre, et les outils. Dans le quatorzième siècle, les peintres, sculpteurs, et architectes, se formèrent en corporation de métiers, et pendant deux ou trois cents ans, en Italie et en Espagne, ils furent obligés de paraître en corps aux cérémonies, comme les orfèvres et tous les corps de métiers manuels. Les peintres espagnols luttaient, jusque dans le dix-septième siècle, pour échapper à cette condition d’artisans.

M. A. — Ainsi vous n’avez point oublié que Giotto, l’émancipateur de l’art, fut un pâtre, ni que Fra Angelico fut un pauvre moine ?

M. Z. — Je n’ai oublié ni Masaccio (le petit Thomas), enfant sans nom ; ni Léonard de Vinci, bâtard d’un notaire de village ; ni Andréa del Sarlo, le fils du tailleur ; ni Corrège, le fils du paysan ; ni Giorgione, le petit George ; ni Tintoret, le fils du teinturier ; ni Titien, élevé par charité chez le père des Zuccalis ; ni Dominiquin, fils d’un cordonnier.

M. A. — Et Murillo, et Velasquez, et Ribera ?

M. Z. — Tous gens de rien, je le sais ; et Alonzo Cano, fils d’un menuisier. Je sais aussi que Poussin, Claude Gelée, Lesueur, Lebrun, Puget, Jean Cousin, Germain Pilon, et Philibert de Lorme, naquirent tous dans le peuple, dans la rue, ou sous le chaume ; à telles enseignes que Jean Goujon fut employé à Home comme ouvrier par le cardinal d’Amboise, à raison de six sous par jour.

M. A. — Les preuves vous écrasent : Albert Devrer, Hans Holbein, Lucas de Leyde, etc. ! Et Quintin Messis, maréchal-ferrant à Anvers ; et la plupart des pein-