Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 2.djvu/136

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Car, vraiment, qui voudrait mettre son esprit aux prises avec un si fol oiseau ? qui voudrait donner un démenti à un oiseau, eût-il beau crier à tue-tête : coucou ?

TITANIA.

— Je t’en prie, gentil mortel, chante encore. — Autant mon oreille est énamourée de ta note, — autant mes yeux sont captivés par ta forme, — et la force de ton brillant mérite m’entraîne, malgré moi, — à la première vue, à dire, à jurer que je t’aime. —

BOTTOM.

M’est avis, madame, que vous avez bien peu de raisons pour ça : et pourtant, à dire vrai, la raison et l’amour ne vont guère de compagnie, par le temps qui court ; c’est grand dommage que d’honnêtes voisins n’essaient pas de les réconcilier. Oui-dà, je sais batifoler dans l’occasion.

TITANIA.

— Tu es aussi sage que tu es beau. —

BOTTOM.

Non, je ne suis ni l’un ni l’autre. Mais, si j’avais seulement assez d’esprit pour me tirer de ce bois, j’en aurais assez pour ce que j’en veux faire.

TITANIA.

Ne demande pas à sortir de ce bois. — Tu resteras ici, que tu le veuilles ou non. — Je suis un esprit d’un ordre peu commun ; — l’été est une dépendance inséparable de mon empire, — et je t’aime. Donc, viens avec moi ; — je te donnerai des fées pour te servir ; — et elles t’iront chercher des joyaux au fond de l’abîme, — et elles chanteront, tandis que tu dormiras sur les fleurs pressées. — Et je te purgerai si bien de ta grossièreté mortelle — que tu iras comme un esprit aérien. — Fleur des Pois ! Toile d’Araignée ! Phalène ! Grain de Moutarde ! —