Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 2.djvu/59

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pour porter le chancelier et ramener la reine d’Écosse.

Durant ces préparatifs, un chose touchait cordialement le pauvre Maitland, c’était la sollicitude que son bon maître lui témoignait dans cette circonstance. Le roi ne voulait rien épargner pour lui rendre le voyage aussi agréable que possible : il visitait chaque jour en personne le navire destiné à son ministre ; il le lestait de provisions, de gibier, de volaille, de bestiaux et de vins exquis. Rien n’était assez friand pour les repas que devait faire à bord ce cher chancelier. Par une attention toute particulière, le roi avait décidé que les gentilshommes de sa chambre tiendraient compagnie à son ministre. Le chancelier ne savait comment reconnaître tant de bontés.

Dans la soirée du 21 octobre 1589, tous les apprêts étaient terminés. Le chancelier ému vient prendre congé du roi : il lui fait ses adieux, d’éternels adieux peut-être. Alors Jacques VI éclate. Il déclare à son ministre qu’il ne veut pas le quitter et qu’il est résolu à partir avec lui. Pas d’observation à faire. Tout est prévu. Tout est arrangé. Pour gouverner le pays en l’absence du roi, voici les lettres patentes qui nomment le duc de Lenox régent d’Écosse. Pour rassurer la nation, voici une proclamation que Jacques a rédigée de sa plus belle écriture :

« Je suis seul au monde. Je n’ai ni père, ni mère, ni frère, ni sœur, et pourtant non-seulement je suis roi de ce royaume, mais je suis héritier apparent d’un autre. J’ai donc pensé que, si je ne me hâtais de me marier dans mes jeunes années, on pourrait me considérer comme une souche stérile, puisqu’un roi sans successeur est impuissant. C’est dans cette vue que j’ai négocié une union avec la princesse Anne de Danemark. Le traité a été conclu, et ma reine s’est mise aussitôt en route. Ayant appris qu’elle était retenue par les vents contraires et qu’elle ne pouvait achever son voyage, j’ai résolu