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DOCUMENTS
SUR LA MAISON DE POLIGNAC



Il est triste de voir s’écrouler et mourir chaque jour le donjon de Polignac. Ce témoin grandiose des âges évanouis domine les sommets du paysage vellave et se dresse comme une protestation suprême contre le réalisme moderne ; planté sur l’énorme brèche volcanique, comme la sentinelle oubliée d’une civilisation morte, il regarde droit vers la ville et jette un dernier défi à la basilique anicienne. Même aujourd’hui ces spectres de pierre, le donjon et la cathédrale, symbolisent notre moyen âge. Du haut de ses tourelles, le vicomte contemplait à son aise le palais de l’évêque, le For, le Cloître, les défenses de Corneille. L’évêque à son tour pouvait, en gravissant quelques marches du rocher d’Anis, observer la forteresse, scruter ses mâchicoulis noirâtres, compter sur son plateau les archers et les arbalétriers mis en bataille. L’antithèse topographique des deux résidences rivales a survécu à toutes les ruines. On croit voir encore les ennemis séculaires se dévorer de l’œil, se menacer, se provoquer à travers la brume du pacifique vallon.

L’évêque et le vicomte : notre histoire gît là tout entière. Les deux figures remplissent la scène. Le roi est trop loin et ne se signale que par de rares apparitions. Qui aura le dernier mot du manoir ou du palais épiscopal ? Est-ce le comte ou le vicomte qui prévaudra ? Telle est la question posée du Xe au XVe siècle et dont les péripéties remuent notre province jusque dans ses fibres les plus intimes. Il est donc très-naturel que nos cher-