Page:Stendhal - Armance, Lévy, 1877.djvu/75

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Hook passait pour l’homme le plus aimable que l’on pût avoir dans un salon ; il improvisait en prose et même en vers avec une incroyable facilité ; personne ne disposait une mystification aussi bien que lui ; auteur et acteur de société, il était l’âme de toutes les réunions qui pouvaient le posséder ; les châteaux se le disputaient dans la saison de villegiatura. Cette vie de plaisirs ruina sa santé, et l’obligea souvent à contracter des dettes qui, toutes, ne furent pas acquittées.

Né à Londres le 22 septembre 1788, Hook y mourut vers la fin du mois d’août 1841.

Avec toutes les allures de la vivacité dans la pensée et de la promptitude dans les actions, Beyle poussait souvent la paresse jusqu’à l’apathie ; entre autres exemples que je pourrais citer, en voici un qui me semble caractéristique.

Dans le courant du mois de janvier 1839, pendant qu’on imprimait simultanément la Chartreuse de Parme et l’Abbesse de Castro, il éprouva une attaque de goutte et de rhumatisme, assez forte pour l’obliger à garder la chambre pendant huit jours ; son travail de composition et de correction n’en fut nullement suspendu pour cela ; seulement, il égara un cahier de soixante pages de la Chartreuse de Parme. N’ayant pu les retrouver au milieu des monceaux de papier qui encombraient sa chambre, Beyle refit ces soixante pages. Elles étaient déjà imprimées lorsqu’il me raconta sa mésaventure ; je me mis à la recherche du manuscrit égaré, et l’aperçus bientôt sous un gros tas d’épreuves, de brochures, etc. Stupéfait de ma facile trouvaille, redoutant, en quelque sorte, la vue de ce manuscrit, il ne voulut pas jeter les yeux dessus, encore moins le comparer avec les pages par lesquelles il l’avait remplacé.

Le 7 mars 1839, M. le comte Molé ayant résigné la présidence du conseil et le portefeuille des affaires étrangères, Beyle jugea bien qu’il lui fallait retourner à Civita-Vecchia. Toutefois, cette résolution ne fut pas prise de gaieté de cœur. Le dernier hiver avait assez maltraité sa santé, en rappelant d’anciennes et douloureuses affections, auxquelles venaient de se joindre des palpitations de cœur. Son esprit s’affligea de ses souffrances physiques, surtout comme symptômes de