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ŒUVRES DE STENDHAL.

échappe au dur empire des besoins, dès qu’une erreur n’est plus punie de mort, il perd la faculté de raisonner juste et surtout celle de vouloir.

J’ai eu affaire à un jeune avocat de Mâcon : il possède une maison qui lui donne cinq mille francs, et par son travail il en gagne dix ; il n’a que trente ans ; il espère bien mourir pair de France et millionnaire. Il se plaignait de son sort, je lui ai soutenu qu’il était l’homme le plus heureux de France. Il agit ; il vaudrait mieux si les institutions étaient plus fortes, il serait Fox ou Pitt. Du temps de l’empereur, il eût été conseiller d’État comme M. Chaban, et eût administré la province de Hambourg.

Mais, à moins d’un miracle, qu’est-ce que peut être un jeune homme né avec quatre-vingt mille livres de rentes, et, si vous voulez, un titre ? Sous Napoléon il eût du moins été forcé d’être sous-lieutenant ou garde d’honneur.

Autant cette ville d’Autun à laquelle j’ai échappé ce matin est morte, autant Châlon me semble plein d’activité, de jeunesse et de vie. C’est de l’activité maritime, un avant-goût de Marseille. La ville est remplie de grands hôtels à quatre étages, où l’on traite avec assez de sans-façon le poisson une fois qu’il est entré dans le filet ; ce sont les termes dont s’est servi mon voisin de la table d’hôte auquel je faisais mes plaintes.

— Hélas, monsieur, lui ai-je répondu, c’est exactement comme à Paris.

Un cafetier met dehors cent mille francs pour décorer son café, mais il n’a pas l’idée de donner quinze cents francs à un Vénitien, élève de Florian, qui saurait faire une tasse de café.

Tous ces hôtels de Châlon, où l’on est mal, ont des enseignes immenses.

J’ai vu une jolie colonne antique de granit sur une des places publiques, et la cathédrale gothique de la fin du treizième siècle.

Châlon est une des villes les plus commerçantes de la France.