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MÉMOIRES D’UN TOURISTE.

de quatre colonnes corinthiennes cannelées. La frise représente des combats de gladiateurs ; elle est surmontée d’un fronton, aux deux côtés duquel sont des Néréides. Entre les quatre colonnes on aperçoit trois trophées composés d’armes ; on y voit des enseignes portant un sanglier. Au-dessus de chacun de ces trophées sont deux figures de captifs, ils ont les mains liées derrière le dos. Au milieu du fronton de cette face orientale est la figure rayonnante du soleil.

La face occidentale est entièrement fruste.

L’intérieur des voûtes est chargé d’ornements, en général, fort élégants ; mais ils ne sont pas tous de la même main, plusieurs sont d’une exécution moins bonne.

Cet admirable monument a servi de forteresse dans le moyen âge ; il était alors surmonté d’une haute tour, et renfermé dans un édifice ; on n’a fait justice de tout cela qu’en 1721.

Un maçon, appelé Geoffroy, a reconstruit, il y a quelques années, une des colonnes qui soutiennent le fronton du côté du midi.

Lerbert, abbé de Saint-Ruf, qui vivait dans le onzième siècle, dit que cet arc de triomphe fut élevé à César vainqueur des Marseillais. On l’appelle aujourd’hui arc de Marius, mais rien ne peut indiquer ni l’époque ni le but de ce monument. Lorsque ce pompeux édifice fut élevé pour éterniser la gloire d’une grande nation et de ses généraux, qui aurait pu prévoir parmi eux qu’il viendrait un temps où il subsisterait encore presque en entier, sans qu’il fût possible de rien savoir sur son objet ?

Le cicérone m’a conduit au grand cire, ce qui veut dire cirque. Ce monument est sur le penchant de la montagne ; ce fut un théâtre et non un cirque. La partie circulaire dans laquelle les sièges des spectateurs étaient établis est pratiquée dans la montagne. On voit encore des tronçons de colonnes énormes ; il y avait trois rangs de colonnes l’un sur l’autre. Le mur qui coupait le demi-cercle et qui formait le fond de la scène existe en entier et produit un effet admirable ; on reconnaît aussitôt la manière