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FÉDER

naturel que le caractère de la jeune Valentine toutes les fois qu’une timidité invincible ne lui fermait pas la bouche.

La visite au chef-d’œuvre de la miniature moderne se termina très froidement, du moins en apparence, de la part de Féder et de Valentine. Féder était étonné de ce qu’il éprouvait, et d’ailleurs songeait, à chaque instant, au rôle difficile qu’il s’était imposé en acceptant à l’improviste, vis-à-vis de Delangle, un travail que la veille il avait refusé avec une conviction si énergique. Valentine, de son côté, était plongée dans un étonnement qu’elle était loin de s’expliquer. Au fond, elle ne concevait pas qu’il pût y avoir à Paris des êtres aussi simples et, en apparence, cherchant aussi peu à être aimables et à occuper l’attention que celui qui s’emparait si entièrement de la sienne depuis quelques instants.

Le lecteur, s’il est de Paris, ne sait peut-être pas qu’en province ce qu’on appelle être aimable, c’est de s’emparer exclusivement de la conversation, parler fort haut, et raconter une suite d’anecdotes remplies de faits improbables autant que de sentiments exagérés, et dont, pour surcroît de ridicule, le narrateur se fait toujours le héros. Valentine se disait, avec toute la naïveté du couvent : « Mais ce monsieur