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1696


m’auroit étranglé, s'il l'avoit pu. Rien n’est assurément plus extraordinaire que l’état jeune et florissant dans lequel je me trouve : vous perdez bien de n’être point ici pour me voir ; combien danserions-nous ensemble aux chansons ! c`est un divertissement à la mode. M. et Mme de Marsan sont allés à Versailles, rien n’est pareil à leur contentement ; mais n'êtes-vous pas trop heureuse, divine Pauline, de n'avoir point épousé M. de Lauzun, qui sans rime et sans raison a planté là sa femme[1] ? On conte des histoires de lui qui ne finissent point, mais que je n'ai pas le temps de vous écrire. C’est pour le lundi gras le mariage du nouveau duc de Châtillon avec Mlle de Royan. La bonne femme Mme de Boutteville[2] lui a envoyé pour quatre-vingt mille francs de pierreries. Il n'y a pas de mariage encore plus heureux que celui de M. de Luxembourg, qui a perdu sa petite fille10 du premier lit, au grand contentement de tous ceux qui en ont herité. M. et Mme de Pracontal partent dimanche pour

  1. 8. Cette séparation ne dura sans doute pas ; car au 15 mai nous lisons dans le Journal de Dangeau : « M. de Lauzun, qui depuis six mois est fort brouillé avec le maréchal et la maréchale de Lorges, et qui pourtant logeoit et mangeoit chez eux, quitta leur maison et en fit sortir sa femme, qui obéit aux ordres de son mari avec bien de la douleur, car elle aime fort son père et sa mère, etc. »
  2. 9. La veuve du décapité (voyez la Notice, p. 12), la grand'mère du nouveau duc de Châtillon (ancien comte de Lux : voyez tome VIII, p. 222, note 4 ; ci-après,p. 444, note 26 ; et ci-dessus, p. 234, note 1, fin}. Elle mourut au mois d’août suivant (Dangeau, au 6 août 1696).