Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 10.djvu/79

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1692 contrat est parti pour Paris. Aussitôt je fis ce madrigal pour le petit comte, qu’il envoya à la demoiselle :

MADRIGAL.

Quand j’appris votre mariage,
Isis, je n’eus pas le courage
De m’en réjouir avec vous ;
Mais quand j’ai su que le futur époux
S’abandonnoit aux malheurs de l’absence,
J’ai repris quelque espérance,
Et sur cela je me suis dit :
« On ne sait qui meurt ni qui vit. »

Je ne sais si je me flatte, mais cela ne me paroît pas encore d’un homme trop enrouillé ; vous en jugerez, ma chère cousine.

Votre nièce s’est aussi amusée en mon absence. Mme de Tavannes[1]et Mme de Toulongeon, entêtées de bouts-rimés cet été, envoyèrent des rimes à Mme de Dalet ; elle les remplit ainsi pour son fils :

BOUT-RIMÉ.

SONNET.

Pour corriger le vice ayez de la vigueur ;
Ne soyez point brutal, mais montrez du courage ;
Tâchez dans vos desseins de n’être point volage ;
Et si vous le pouvez, gardez bien votre cœur.

Fuyez l’air étourdi, fuyez l’air de langueur ;
D’un ami bien choisi n’ayez jamais d’ombrage ;
Faite’amas de vertus pour le temps de l’orage ;
Rien que sur vos défauts n’ayez de la rigueur ;

Contre toutes leçons ne soyez point rebelle ;
Faites-vous des amis, puis soyez-leur fidèle ;
D’amour, du vin, du jeu, tenez tout pour suspect ;

    d’Épiry. (Note de l’édition de 1818.) C’était sans doute le fils de la comtesse de Ragni dont il est parlé au tome V, p. 504 et note 7.

  1. 5. Voyez tome VII, p. 216, note 5.