Page:Tailhade - À travers les grouins, 1899.djvu/129

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furieuse, immédiate et déchaînée : cymbales, trompettes, fifres suraigus. Des coureurs frottés d’huile, des eunuques en robe verte, des cornacs aux manteaux d’hyaicinthe cramoisie, des soldats aux chevelures empennées s’agitaient secouant mille flambeaux autour des palanquins et des bêtes de somme. Des éléphants imbriqués de verroteries, de plaques métalliques et de housses diaprées ; des onagres au pelage de tigre avançaient parmi la foule. On eût dit, çà et là, de pesants navires sur une mer où le col sinueux des girafes et la bosse des dromadaires faisaient, par place, ondoyer quelques remous. Un héraut à dalmatique d’or, chargé de bracelets et de pendants d’oreilles, vociféra, dans un buccin de cuivre, son altière fanfare, apprenant aux quatre vents du ciel que les Rois Mages en personne daignaient perambuler à travers la nuit. Dans le ciel de velours noir éclaboussé de gemmes, une étoile insolite brillait sur le cortège. Ses feux multiples irradiaient, bleus comme le saphir, vineux comme le rubis, troubles comme l’opale, aveuglants comme l’escarboucle, limpides comme le diamant.

Bientôt les augustes cavaliers mirent pied à terre, car la fantastique étoile, pareille à un serpenteau mal