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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


suffisent pour lancer dans les voies de fait une foule souffrante, et il est inévitable qu’elle prenne pour conseillers et conducteurs ceux qui la poussent du côté où déjà elle penche. Il faut toujours des chefs au peuple, et il les prend où il les trouve, tantôt dans son élite, tantôt dans sa canaille. À présent que la noblesse est chassée, que la bourgeoisie se retire, que les gros cultivateurs sont suspects, que le besoin animal exerce son despotisme intermittent et aveugle, ses ministres appropriés sont les aventuriers et les bandits. Il n’est pas nécessaire qu’ils soient très nombreux : dans un lieu plein de combustible, quelques boutefeux suffisent pour allumer l’incendie. On en compte « une vingtaine au plus dans chacune des villes d’Étampes et de Dourdan,… hommes n’ayant rien à perdre et tout à gagner dans les troubles : ce sont eux qui excitent toujours la fermentation et le désordre, et les autres citoyens, par leur indifférence, leur en fournissent les moyens ». Parmi les nouveaux guides de la foule, ceux dont on sait les noms sont presque tous des repris de justice, habitués par leur métier antérieur aux coups de main, aux violences, souvent au meurtre et toujours au mépris de la loi. — À Brunoy[1], les chefs de l’émeute

    détourné par les accapareurs et les ennemis du nouveau régime. Les fermes sont trop grandes : divisez-les. Il y a trop de pâturages : mettez tout en blé. Forcez chaque propriétaire ou fermier à déclarer sa récolte ; qu’on en proclame le chiffre au prône ; en cas de mensonge, que l’homme soit mis à mort ou en prison, et son blé confisqué. Obligez tous les cultivateurs des environs à ne vendre qu’à Forges, etc., etc.

  1. Archives nationales, F7, 3268. Rapport des commissaires