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LA RÉVOLUTION


n’est distribué par les districts entre les communes qu’aux mois d’octobre, novembre et décembre 1791. Ainsi, aux derniers mois de 1791, il n’est pas encore distribué par les communes entre les contribuables ; d’où il suit que, sur l’exercice de 1791, pendant toute l’année 1791, le contribuable n’a rien payé. — Enfin, en 1792, chacun commence recevoir sa cote. Avec quelle partialité et quelles dissimulations ces cotes sont faites, il faudrait un volume pour le dire. C’est que d’abord l’emploi de répartiteur est dangereux, et que les municipalités, chargées d’appliquer à chacun sa quote-part, ne sont pas à leur aise dans la maison commune. Déjà en 1790[1] les officiers municipaux de Montbazon ont été menacés de mort, si, au rôle de la taille, ils osaient taxer l’industrie, et ils se sont sauvés à Tours au milieu de la nuit. À Tours même, trois ou quatre cents insurgés du voisinage, traînant avec eux les officiers municipaux de trois bourgades, sont venus déclarer aux autorités de la ville « que, pour toute imposition, ils ne voulaient payer que quarante-cinq sous par ménage ». J’ai conté comment en 1792, dans le même

  1. Archives nationales, H, 1453. Correspondance de M. de Bercheny, 5 juin 1790, etc. — F7, 3226. Lettres de Chenantin, cultivateur, 7 novembre 1792, et du procureur syndic, 6 novembre. — F7, 3269. Procès-verbal de la municipalité de Clugnac, 5 août 1792. — F7, 3202. Lettre du ministre de la justice Duport, 3 janvier 1792. « Le défaut absolu de force publique dans le district de Montargis y rend absolument impossible toute opération du gouvernement et toute exécution des lois. L’arriéré des impôts à recouvrer y est très considérable, et les contraintes dangereuses à décerner et impossibles à mettre à exécution, tant par la crainte des huissiers qui n’osent s’en charger, que par la violence des contribuables auxquels on n’a aucun frein à opposer. »