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LE PROGRAMME JACOBIN


« connaissance de leurs droits, de leurs devoirs, des lois, de la morale républicaine, » et, à leur entrée dans le monde, ils se trouveront imbus de toutes les bonnes maximes. — Par delà leurs opinions politiques, nous façonnons leurs habitudes pratiques. Nous appliquons en grand le plan d’éducation tracé par Jean-Jacques[1]. Nous ne voulons plus de freluquets lettrés ; à l’armée, « le muscadin crève dès la première campagne[2] » ; il nous faut des jeunes gens capables de résister aux privations et à la fatigue, endurcis, comme Émile, « par un métier pénible » et par les exercices du corps. — Sur cette partie de l’éducation, nous n’avons encore que des projets ; mais la concordance des ébauches suffit pour manifester le sens et la portée de notre principe. « Tous les enfants, sans distinction et sans exception, dit Le Peletier de Saint-Fargeau[3], les garçons de cinq à douze ans, les filles de cinq à onze ans, sont élevés en commun aux dépens de la République ; tous, sous la sainte loi de l’égalité, recevront mêmes vêtements, même nourriture, même éducation, mêmes soins, » dans les internats distribués par canton et contenant chacun de quatre à six cents élèves, « Les

  1. Moniteur, XVIII, 351-359 (séance du 15 brumaire an II, rapport de M. J. Chénier), « Vous avez fait des lois ; faites des mœurs… Vous pouvez appliquer à l’instruction publique et à la nation entière la marche que J.-J. Rousseau a suivie pour Émile. »
  2. Paroles de Bouquier, rapporteur, séance du 22 frimaire an II.
  3. Buchez et Roux, XXIV, 57 (Plan de Le Peletier de Saint-Fargeau, lu par Robespierre à la Convention, le 13 juillet 1793). — Ib., 85 (Projet de décret par le même).