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LA RÉVOLUTION


« systèmes antipopulaires, dit le rapporteur[1], combinent péniblement leurs projets ! Les Français n’ont qu’à descendre dans leurs cœurs ; ils y lisent la république. » Rédigé d’après le Contrat social, avec des réminiscences grecques et latines, le projet résume, « en style lapidaire, » les aphorismes en vogue, les dogmes et prescriptions mathématiques de Rousseau, « les axiomes de la Raison et les premières conséquences de ces axiomes, » bref la Constitution rectiligne que tout écolier bâcle au sortir du collège. Comme un prospectus affiché à la porte d’un magasin nouveau, celle-ci promet aux chalands tout ce qu’ils peuvent imaginer de plus beau et de plus désirable. Voulez-vous des droits et des libertés ? Les voici tous, et les voici toutes. Jamais on n’a déclaré plus expressément que le gouvernement est la créature, le serviteur et l’instrument des gouvernés : il n’est institué[2] que « pour leur garantir la jouissance de leurs droits naturels et imprescriptibles ». Jamais on n’a plus strictement limité son mandat : « Le droit de manifester sa pensée et ses opinions, soit par la voie de la presse, soit de toute autre manière, le droit de s’assembler paisiblement, le libre exercice des cultes, ne peuvent être interdits. » Jamais on n’a mis les citoyens plus en garde contre les empiétements et les excès de l’autorité publique : « La Loi doit protéger la liberté publique et individuelle contre l’op-

  1. Buchez et Roux, XXVIII, 178 (Rapport de Hérault de Séchelles).
  2. Buchez et Roux, XXXI, 400 (articles de la Déclaration des Droits, 1, 7, 9, 11, 27, 31, 35).