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LA RÉVOLUTION


tant plus que, sous leurs yeux, le Tribunal révolutionnaire siège en permanence, que, sur la place de la Révolution, la guillotine est montée et travaille, qu’un récent arrêté de la Commune enjoint aux administrateurs de police « la plus active surveillance » et prescrit à la force armée « des patrouilles continuelles », que, du 1er  au 4 août, les barrières ont été fermées, que, le 2 août, une rafle, exécutée dans trois théâtres, a mis plus de cinq cents jeunes gens sous les verrous[1]. Les mécontents, s’il y en a, découvrent vite que ni l’endroit ni le moment ne sont bons pour protester.

Quant aux autres, déjà jacobins, la faction s’est chargée de les rendre plus jacobins encore. Perdus dans l’immense Paris, tous ces provinciaux ont besoin d’être guidés, au moral comme au physique ; il convient d’exercer à leur endroit « la plus douce vertu des républicains, l’hospitalité dans toute sa plénitude[2] ». C’est pourquoi quatre-vingt-seize sans-culottes, choisis par les sections, les attendent à la mairie, pour être leurs correspondants, peut-être leurs répondants, et certainement leurs pilotes, pour leur distribuer les billets de logement, les accompagner, les installer, pour les endoctriner comme autrefois les fédérés de 1792, pour les empêcher de faire de mauvaises connaissances,

    en fraternisant avec eux, de les empêcher d’être séduits ou entraînés par les suggestions perfides de quelques scélérats, amis du fédéralisme, qui se trouvent parmi eux… Déjà quelques patriotes commissaires ont dénoncé plusieurs de leurs confrères accusés d’aimer la royauté et le fédéralisme. »

  1. Buchez et Roux, XXVIII, 408.
  2. Moniteur, XVII, 330 (Arrêté de la Commune, 6 août).