Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/202

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Il a deux neveux qui ont aussi fait des mariages avec des personnes où il y avoit à refaire. Persan-Bournonville a quitté une bonne abbaye pour la Chazelle, et Vitry a épousé la petite de Rhodes, dont la naissance étoit si peu certaine qu’il fallut donner vingt mille écus à Senecterre pour l’empêcher de prendre requête civile.

La feue maréchale gouvernoit absolument son mari, lui faisoit traiter ses enfants de princes : elle n’en a point eu de lui ; et, pour frustrer M. de Vitry, elle lui faisoit vendre ses terres et en acheter d’autres, afin qu’ils fussent acquêts de la communauté. Il avoit même accordé la petite de Romorantin, fille d’un fils de la maréchale, au fils de M. de Brienne ; mais, depuis, ce mariage se rompit.

Cette extravagante se faisoit servir sept à huit potages dans des bassins, et après on apportoit un poulet d’Inde, deux poulets et une fricassée, et au dessert, un fromage mou et des pommes ou des confitures. Elle s’avisa, en 1650, de se vouloir purger au printemps, et dit au fils de son apothicaire, dont le père venoit de mourir : « Faites-moi une médecine comme votre père faisoit. » On ne sait si ce garçon fit quelque quiproquo, mais tant il y a qu’elle y fut plus de cinquante fois, fit bien du sang, et pensa rendre tripes et boyaux. Enfin, elle mourut l’année suivante ; son mari trouva assez de dettes, à quoi il ne s’attendoit pas. Il n’y avoit point d’ordre avec cette femme, et de plus, il lui falloit toujours quelqu’un qui sans doute vouloit être bien payé. À Vitry, dont il étoit gouverneur particulier, quoiqu’il fût seul lieutenant de roi sous M. le prince de Conti,