Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol19.djvu/54

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sance positive et ne montre la grandeur de l’esprit humain, que lorsqu’elle n’introduit pas dans ses études la cause finale. Au contraire, la science spéculative n’est science et ne montre la grandeur de l’esprit humain que lorsqu’elle écarte totalement les questions des phénomènes de causes et n’envisage l’homme que par la cause finale. Telle est, dans ce domaine dont elle est le pôle, la science métaphysique ou la philosophie.

Cette science pose nettement la question : « Que suis-je ? qu’est l’univers ? Pourquoi suis-je, et pourquoi est l’univers ? » Et depuis qu’elle existe, elle donne toujours la même réponse.

Que le philosophe appelle essence de la vie, qui est en moi et en tout ce qui existe, les idées, la substance, l’esprit ou la volonté, il ne veut dire qu’une même chose : que cette essence existe, que je suis cette essence. Mais pourquoi existe-t-elle ? il n’en sait rien, et s’il est un penseur sincère, il ne répond pas. Je demande : « Pourquoi cette essence existe-t-elle ? Que résultera-t-il de ce qu’elle est et sera ? » Et la philosophie non seulement ne répond pas à cette question, mais elle-même la pose. Si elle est la vraie philosophie, tout son travail ne consiste même qu’à poser clairement cette question ; et si elle se tient fermement à ce problème, alors à la question : « Que suis-je, moi, et qu’est tout l’univers ? » elle ne peut répondre que ceci : « Tout et rien ». Et à la question : « Pour-