Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol17.djvu/267

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manières d’une jeune fille de la bonne société, manières sans lesquelles Serge Ivanovitch ne pouvait se représenter la compagne de sa vie. Enfin, elle était religieuse, non comme une enfant, comme Kitty par exemple, mais toute sa vie était basée sur de sérieuses convictions morales. Jusque dans les moindres détails Serge Ivanovitch trouvait en elle tout ce qu’il désirait trouver en sa femme. Elle était pauvre et sans famille, de sorte qu’elle ne traînerait pas derrière elle une foule de parents et n’imposerait pas leur influence dans la maison de son mari ; c’était précisément ce qu’il désirait pour sa future vie de famille. Et cette jeune fille qui réunissait toutes ces qualités l’aimait. Quelque modeste qu’il fût il s’en apercevait et l’aimait aussi. Il y avait bien un obstacle : son âge ; mais il jouissait d’une bonne santé, n’avait pas un seul cheveu blanc ; personne ne lui donnait quarante ans et il se rappelait avoir entendu dire à Varenka qu’un homme de cinquante ans ne passait pour un vieillard qu’en Russie ; qu’en France un homme à cinquante ans se croit dans la force de l’âge et, à quarante ans, un jeune homme.

Et qu’importaient les années quand il se sentait jeune de cœur comme à vingt ans. N’était-ce pas un sentiment de jeune homme, celui qu’il éprouva quand sortant de l’autre côté du bois et entrant à la lumière claire des rayons obliques du soleil, il vit la gracieuse personne de Varenka, en robe jaune,