Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/354

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voir parler, et tressaillait de tout son corps. Elle ne simulait pas, elle était véritablement malade. Vers l’aube elle se calma, et nous nous réconciliâmes sous l’influence de ce que nous appelions l’amour. Le lendemain matin, quand, après la réconciliation, je lui avouai que j’étais jaloux de Troukhatchevsky, elle ne parut pas embarrassée et se mit à rire de l’air le plus naturel, si étrange lui sembla l’idée de céder à un pareil homme.

— « Est-ce qu’avec un tel homme une honnête femme peut éprouver un autre sentiment que le plaisir de faire de la musique ? Mais, si tu veux, je suis prête à ne jamais le revoir, même dimanche, quoique tout le monde soit invité. Écris-lui que je suis souffrante, et ce sera fini. Une seule chose m’agace, c’est que quelqu’un, et principalement lui, ait pu penser qu’il est dangereux ! Je suis trop fière pour permettre à quelqu’un de pareilles pensées. »

Et elle ne mentait pas. Elle croyait ce qu’elle disait. Elle espérait provoquer en elle-même par ses paroles du mépris pour lui et par là se défendre. Mais elle n’y parvenait pas. Tout conspirait contre elle, surtout cette abominable musique. Ainsi se termina la querelle, et, le dimanche, nos invités se réunirent., Troukhatchevsky en ma femme firent de nouveau de la musique ensemble.