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ABL. ABN. ABO. ABO.


Tout bien considéré, en matière de Religion, le plus sûr est de s’en tenir aux décisions de l’Eglise. Port-R.

ABSOLUTOIRE, adj. Qui porte absolution. Absolutorius. Il a une sentence absolutoire.

ABSORBANS. Terme de Médecine. Medicamina ad absumendum nata. Ce sont des médicamens qui ont une puissante vertu pour consumer l’humeur amollie, & attenuée sans la dissoudre. On s’en sert ordinairement pour les tumeurs, après avoir employé les emoliens & les attenuatifs. Ces médicamens sont le vinaigre, l’eau marine, la saumure, &c. S. Evr.

ABSORBER, v. act. Engloutir, dissiper, consumer, emporter. Absumere. Les eaux absorbent presque toute la lumière qu’elles reçoivent du soleil. Roh. Il est peu en usage au propre, si ce n’est en parlant des animaux voraces : mais il se dit au figuré, & il emporte d’ordinaire un mauvais sens. Les droits de la Femme ont absorbé tous les biens du Mari. Le frais d’un scellé absorbent les plus clairs deniers de cette succession. Ce goinfre a absorbé tout son patrimoine. La voix est absorbée dans les voûtes. Ablanc. c’est-à-dire, qu’elle s’y perd. La question de l’infaillibilité de l’Eglise absorbe toutes les autres controverses. Claude. Ce mot vient du Latin absorbeo, signifiant le même.

ABSOUDRE, v. act. Décharger d’une accusation, de la peine d’un crime. Remettre un crime commis. J’absous, tu absout, nous absolvons, vous absolvez, ils absolvent. Imparf. j’absolvois. Fut. j’absoudrai. Subj. que j’absolve. Part. act. absolvant. Part. passif, absous. Absolvere. Absoudre un Pénitent, lui remettre ses péchés dans le Tribunal de la Confession. Dans le doute il est plus expédient d’absoudre un criminel, que de condamner un innocent. Court. On l’a absous à pur & à plein. On dit aussi dans le discours familier, en parlant d’un défunt, que Dieu absolve, c’est-à-dire, à qui Dieu fasse misericorde.

Absous, oute. adj. Affranchi, ou déchargé de crime. Absolutus.

Absous, se dit aussi en matière civile. Un défendeur conclut toujours à être renvoyé quitte & absous de la demande qu’on lui a faite.

ABSOUTE, s. f. Absolution publique & solemnelle qui se donne au Peuple. Dies absolutionis. L’Evêque en fait la cérémonie le Jeudi Saint, ou le Mercredi au soir dans les Cathédrales. L’absoute se fait aussi par les Curez dans les Paroisses le jour de Pâques.

ABSTEME, s. m. Terme dogmatique. Qui ne boit point de vin. Abstemius. On s’en sert en Théologie, pour parler de ceux qui dans la Communion ne peuvent point boire de vin, à cause de l’aversion naturelle qu’ils ont pour cette liqueur. Mr de Meaux s’est servi de l’éxemple des abstêmes, pour défendre le retranchement de la Coupe.

ABSTENIR, v. n. Qui ne se dit qu’avec le pronom personnel. Se défendre l’usage, se contenir à l’égard de quelque chose, se priver de quelque plaisir. Abstinere, temperare. Conjuguez, je m’abstiens ; je m’abstenois ; je m’abstins ; je me suis abstenu ; je m’abstiendrai ; je m’abstiendrois, &c. Ils sentent, à chaque péché qu’ils commettent, un avertissement intérieur de s’en abstenir. Pasc. Il faut se garder, & s’abstenir de se mettre en colère. Ils disoient qu’Auguste s’étoit abstenu de la qualité de Dictateur. Ablanc. Il faut s’abstenir du vin pendant la fièvre. Les Chrétiens ne s’abstenoient de viande pendant leurs jeûnes, que pour mortifier les sens. Du Pin. Les Juifs étoient obligés de s’abstenir de leurs femmes pendant certains temps. Il ne se peut abstenir de jouer, de parler. Il faut s’abstenir de manger des choses défendues par la Loi.

Abstenir, se dit aussi en matière de récusation de Juges ; & quand la Cour la trouve bien fondée, elle dit pour adoucir l’expression, que le Juge s’abstiendra, c’est-à-dire, de rapporter le proces, ou d’y opiner.

ABSTINENCE, s. f. Vertu morale par laquelle on s’abstient de certaineschoses, en vertu d’un précepte moral, ou d’une institution cerémonielle. Abstinentia. C’est une espèce de la tempérance, & elle se confond quelquefois avec la sobriété. Le grand jeûne, dit S. Augustin, est l’abstinence des vices. Les Athlètes, pour se rendre plus robustes, vivoient dans une abstinence générale de tous les plaisirs. Dac. L’Eglise a enjoint aux Ecclésiastiques l’abstinence des femmes : elle a marqué aussi certains jours de jeûne, & d’abstinence. Il se dit aussi de la simple modération dans l’usage des alimens. On


fait des abstinences par un pur régime de vivre, comme de vin, de salines, &c. La diète & l’abstinence sont nécessaires, pour rétablir l’estomac affoibli par la débauche.

Abstinence, signifie quelquefois une simple privation de manger de la chair. Abstinentia carnium. L’abstinence des viandes assaisonnée de dévotion, & accompagnée de la prière, est un des moyens les plus efficaces pour avancer notre sanctification. Boss. L’Eglise ordonne simplement l’abstinence le jour de Saint Marc, & non pas le jeûne. Les Mercredis sont des jours d’abstinence, chez plusieurs Religieux. Les dévots font aussi des abstinences, & des macérations volontaires.

ABSTINENT, ente, adj. Tempérant à l’égard du boire & du manger. Sobrius. Les Peuples du Midi sont plus abstinens que ceux du Septentrion.

ABSTERGER, v. act. Terme de Médecine & de Chirurgie. Purger, nettoyer une plaie. Abstergo.

Abstersif, ive, adj. Qui purge & nettoye. Smegmaticus, smecticus. Médicament, purgation abstersive. Smegma.

ABSTRACT, acte. Terme de Philosophie. Il est un peu barbare en François. Ce qu’on détache par la pensée de toute autre chose, afin d’en avoir une connoissance simple, & par lui-même. Species abstracta per mentem. La quantité est un terme abstract, quand on la considère en elle-même, & sans être attachée à un corps, quoiqu’elle ne puisse subsister naturellement sans lui, ni lui sans elle. La blancheur est un terme abstract, quand on la considère détachée d’un sujet. De la connoissance des abstracts on parvient à celle des concrets, qui est le terme opposé.

ABSTRACTION, s. f. C’est une action de l’esprit, par laquelle on considère quelque partie d’un tout, sans faire attention aux autres : ou un détachement qui se fait par la pensée de tous les accidens ou circonstances qui peuvent accompagner un Être, pour le considérer mieux en lui-même. L’abstraction est l’action ou l’éxercice d’une faculté, ou puissance propre & particulière à l’esprit de l’homme, & qui distingue entièrement & essentiellement son ame de celle des bêtes ; faculté qui consiste en ce que l’homme peut, en élevant ses idées au-dessus des Êtres particuliers, en faire des représentations générales du tout de la même espèce, auquel tous les Philosophes donnent le nom d’universel. Actio animi speciem aliquam abstrahentis. On considère par abstraction, lorsque dans un mobile on considère le mouvement, sans faire attention au corps mû. Ce sont les Mathématiciens qui, qui considérant la quantité sans matière, supposent dans leur empire d’abstraction des indivisibles sans parties : mais il n’est pas permis aux Physiciens de faire ces sortes d’abstractions, ni de sortir des bornes de la matière. Bern. Pour bien juger d’un homme, il faut faire abstraction de tout ce qui nous peut préoccuper, ou pour, ou contre lui.

ABSTRAIRE. v. act. faire une abstraction, un détachement de toutes les qualités d’une chose, pour ne considérer que son essence.. Abstrahere. J’abstrais, tu abstrais, il abstrait ; nous abstrayons, vous abstrayez, ils abstraient. Quand on raisonne en Algèbre, on abstrait la quantité, le nombre de toutes sortes de matières & de sujets. Il y a plusieurs temps de ce verbe qui ne sont point usités, comme l’imparfait, le prétérit indéfini, &c.

Abstrait, aite, part. & adj. se dit figurément en Morale d’un esprit qui ne s’applique à rien, qui n’entre point dans la conversation ; qui se sépare & s’éloigne des choses sensibles par le moyen de l’esprit : d’un homme qui détache ses regards de tous les objets qui l’environnent, pour ne s’attacher qu’à la contemplation de celui qu’il a dans la pensée. Abstractus. Cet homme est abstrait, dédaigneux, & semble toujours rire en lui-même de ceux qu’il croit ne le valoir pas. La Bruy. On dit qu’Un homme est abstrait, quand il ne répond pas à celui qui lui parle, parce qu’il songe à autre chose.

On dit encore des raisonnemens abstraits, pour exprimer qu’ils sont trop subtils. Argumenta tenui filo diducta. Ces idées sont abstraites, & ne tombent point sous l’imagination. Malb. C’est une Philosophie abstraite & chimérique. Port-R. pour dire, une Philosophie trop dégagée des choses sensibles, trop métaphysique & trop difficile à pénétrer. On ne doit pas confondre la définition d’une idée abstraite & arbitraire, avec la définition des choses qui éxistent réellement. Le Cl.

ABSTRUS, use. adj. qui est caché & inconnu au commun du monde, qui demande une extrême application pour être entendu. Abstrusus. L’Algèbre, les Sections Coniques, sont des Sciences, des matières fort abstruses, où peu de personnes peuvent pénétrer.


ABSURDE, adj. masc. & fém. Terme de Philosophie. Ce qui choque le sens commun, qui est impertinent, incroyable, impossible. Absurdus. Proposition absurde. Quand on suppose une chose absurde, on en tire mille conséquences absurdes. Il prouve une chose absurde, par une chose plus absurde.

ABSURDEMENT. adv. d’une manière absurde. Absurdè. C’est conclure absurdement, que de dire, &c.

ABSURDITE’, s. f. Qui contient quelque chose d’absurde. Absurdè dictum aut factum. Il s’ensuivroit de grandes absurdités d’une telle supposition. La plus grande des absurdités est la contradiction. Quelle foi peut-on ajoûter à des gens qui proposent sérieusement d’aussi grandes absurdités ? Le Gend.

ABSUS. s. m. Herbe qui croit en Egypte, à la hauteur de quelques doigts. Ses feuilles ressemblent à celles du triolet ; & ses fleurs blanches, & d’un jaune pâle, produisent une semence noire, renfermée dans de petites cellules.

ABSYNTHE, ou ABSINTE. s. m. & f. Absinthium, selon Malherbe ; & selon Vaugelas, toujours masculin. On le fait plus ordinairement féminin. L’Académie Fr. le fait féminin. Ménage veut qu’on écrive apsynthe par un p, sans doute à cause de l’étymologie. C’est une plante médécinale. Il y en a de quatre sortes : Le santonique, le marin, le vulgaire ou grand Pontique, & le petit. L’absynthe commune a une tige fort branchuë, des feuilles blanches et fort découpées, comme l’artemisia ; ses fleurs dorées & petites. Sa graine est ronde, & disposee comme une grappe de raisin. Sa racine est fort esparpillée. Cette absynthe vulgaire est plus en usage dans la Médecine. Plusieurs croyent que c’est la barbotine, qu’on appelle semen sanctum ; mais Mathiole dit que c’est une plante bien différente. Quelques-uns prétendent que l’absynthe est l’auronne femelle. Il y a une seconde espece d’absynthe qu’on appelle petite aluyne, qui est semblable à la petite auronne étant toute encassée de petite graine fort amere, qu’on appelle en Latin absinthium marinum, ou Scriphium. L’absynthe santonique est la troisieme espèce, qui est semblable à l’alcine, mais qui est moins chargée de graine que l’autre. On fait du vin d’absinthe, & de l’eau d’absinthe. L’absinthe est une herbe odiférante, très-amère, astringente & corroborative : c’est pourquoy l’on s’en sert pour fortifier les viscères affoiblis. Outre son amertume, la nitrosité dont elle participe, fait qu’elle purge la matiére bilieuse contenuë au ventricule & au foye. Elle tuë les vers même en l’appliquant exterieurement. L’absinthe attenuë, & déterge. Elle est apéritive & provoque les urines & les suëurs, & tout cela avec quelque astriction. On ne se sert que des feuilles, & des sommites de cette plante. Vin d’Absinthe, vinum absynthites.

Absynthe, figurément, signifie Douleur, amertume, déplaisir. Dolor animi. Mais je ne voudrois pas hasarder à l’employer au plurier comme Malherbe, qui a dit, adoucir toutes nos absinthes.

Ce mot vient d’α, particule privative en Grec, & πίνθιον ; c’est-à-dire, impotabile, non potable ; parce que c’est une plante si amère, qu’on a de la peine à boire une liqueur dans laquelle elle aura trempé. D’autres le font venir d’ἅψισθον, indelectabile, à cause de l’amertume qui rend cette plante désagréable. Cette étymologie paroît plus juste, & justifie en même temps l’orthographe d’absinthe sans y.

ABU.

ABUNA, ou ABOUNA. s. m. qui signifie pere. Terme arabe qui se trouve dans les Relations. C’est un nom de dignité qu’on donne aux Religieux. On pretend que les Abyssins le donnent aussi à leur Patriarche, qui leur est envoyé par celui d’Alexandrie.

ABUS, s. m. Dérèglement, ce qui se fait contre la nature & le bon ordre. Abusus. Il y avoit des abus dans tous les ordres de l’état, qui ont été réformés par Louïs le Grand. Les Conciles, les Ordonnances, tendent à réformer les abus contre la Discipline & la Police. C’est le Grand Constantin, qui, en introduisant les richesses dans l’Eglise, y a introduit en même-temps les abus, & le relâchement de la Discipli-


roussins