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mes hôpitaux

drilles, une chemise, un bonnet de nuit, un paletot-sac bleu de Prusse, une calotte de drap, même couleur (on est aux premiers jours de mai ; le costume d’été, paletot plus léger et chapeau de paille, part du 15 de ce mois), un essuie-main et une serviette de table. Alors, direz-vous, tout convalescent est considéré comme possédant un pantalon ? Mon Dieu oui.

— « Galerie chose, chambrée telle ! »

Et le poète entre dans une pièce cirée beaucoup trop pour son « ankylose incomplète du genou gauche, consécutive à une arthrite rhumatismale ». Trois lits dont les convalescents doivent faire les literies tous les matins d’après certains principes, comme au régiment, de même qu’ils doivent balayer et cirer ce parquet, hélas ! si glissant !

Les compagnons actuels du poète sont un gardien de square, un bonhomme peu causeur, et un tout jeune homme, seize ans à peine, une tête blonde de très jolie fille anglaise que rehausse toutefois une grâce déjà virile. Il remarque la difficulté qu’éprouve le poète à mettre son espadrille gauche, se met gentiment à sa disposition. Mais la cloche sonne, on va dîner, entrée lente au réfectoire, bon repas, meilleur qu’à l’hôpital, même du dessert, quelle joie ! sortie en file indienne sous l’œil terrifique un peu du surveillant préposé au réfectoire, après une récitation à haute et intelligible voix du sempiternel règlement.