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pareil. Les pieds-droits de l’arcature à jour sont perpendiculaires à la direction des deux buttées, et les étrésillonnent ainsi beaucoup mieux que s’ils étaient verticaux, comme dans les arcs-boutants des chœurs de la cathédrale d’Amiens et de l’église d’Eu, donnés figures 62 et 63. Ces deux buttées rigides AB, CD, ne sont pas parallèles, mais se rapprochent en AC comme deux étais de bois, afin de mieux reporter la poussée agissant de B en F sur l’arc-boutant unique de la première volée E. La buttée rigide AB sert d’aqueduc pour les eaux du comble. Par le fait, cette construction est plus savante que gracieuse, et l’art ici est complètement sacrifié aux combinaisons géométriques.

Ce système d’arcs-boutants à jour, rigides, fut quelquefois employé avec bien plus de raison lorsqu’il s’agissait de maintenir une poussée agissant sur un vide étroit, comme dans la Sainte-Chapelle basse de Paris (XIIIe siècle). Là, cet arc-boutant se compose d’une seule pierre évidée venant opposer une résistance fort légère en apparence, mais très-rigide en réalité, à la pression d’une voûte.

La Sainte-Chapelle basse du Palais se compose d’une nef et de deux bas côtés étroits, afin de diminuer la portée des voûtes dont on voulait éviter de faire descendre les naissances trop bas ; mais les voûtes de ces bas côtés atteignant la hauteur sous clef des voûtes de la nef (68), il fallait s’opposer à la poussée des grands arcs-doubleaux et des arcs-ogives au point A, au moyen d’un véritable étrésillon. L’architecte imagina de rendre fixe ce point A, et de reporter sa poussée sur les contre-forts extérieurs, en établissant un triangle à jour ABC découpé dans un seul morceau de pierre.

Ce système d’arc-boutant, ou plutôt d’étrésillon, est employé souvent dans les constructions civiles pour contre-butter des poussées. Les manteaux des quatre cheminées des cuisines dites de saint Louis, au Palais de Paris, sont maintenus par des étrésillons pris également dans un seul morceau de pierre découpé à jour (voy. Cheminée).

Il n’en résulte pas moins que l’arc-boutant surmonté d’un aqueduc se perfectionne sous le point de vue de la parfaite connaissance des poussées pendant les XIVe et XVe siècles, comme l’arc-boutant simple ou double. Les constructeurs arrivent à calculer exactement le poids qu’il faut donner aux