Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome14.djvu/189

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Ces peuples étaient tantôt attaqués par les Suédois ou par les Moscovites, et tantôt par les Turcs. Les Suédois, nation plus libre encore par sa constitution, qui admet les paysans mêmes dans les états généraux, mais alors plus soumise à ses rois que la Pologne, furent victorieux presque partout. Le Danemark, autrefois formidable à la Suède, ne l’était plus à personne ; et sa véritable grandeur n’a commencé que sous ses deux rois Frédéric III et Frédéric IV[1]. La Moscovie n’était encore que barbare.


DES TURCS.


Les Turcs n’étaient pas ce qu’ils avaient été sous les Sélim, les Mahomet, et les Soliman : la mollesse corrompait le sérail, sans en bannir la cruauté. Les sultans étaient en même temps et les plus despotiques des souverains dans leur sérail, et les moins assurés de leur trône et de leur vie. Osman et Ibrahim venaient de mourir par le cordeau. Mustapha avait été deux fois déposé. L’empire turc, ébranlé par ces secousses, était encore attaqué par les Persans ; mais quand les Persans le laissaient respirer, et que les révolutions du sérail étaient finies, cet empire redevenait formidable à la chrétienté : car depuis l’embouchure du Borysthène jusqu’aux États de Venise, on voyait la Moscovie, la Hongrie, la Grèce, les îles, tour à tour en proie aux armes des Turcs, et, dès l’an 1644, ils faisaient constamment cette guerre de Candie si funeste aux chrétiens. Tels étaient la situation, les forces, et l’intérêt des principales nations européanes vers le temps de la mort du roi de France Louis XIII.


SITUATION DE LA FRANCE.


La France, alliée à la Suède, à la Hollande, à la Savoie, au Portugal, et ayant pour elle les vœux des autres peuples demeurés dans l’inaction, soutenait contre l’empire et l’Espagne une guerre ruineuse aux deux partis, et funeste à la maison d’Autriche. Cette guerre était semblable à toutes celles qui se font depuis tant de siècles entre les princes chrétiens, dans lesquelles des millions

  1. Voyez page 9.