Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/264

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— Si l’on vous dit : Les Suisses ont de gras pâturages qui coûtent peu.

Répondez : L’avantage est pour nous, car ils nous demanderont une moindre quantité de travail pour fournir des moteurs à notre agriculture et des aliments à nos estomacs.

— Si l’on vous dit : Les terres de Crimée n’ont pas de valeur et ne paient pas de taxes.

Répondez : Le profit est pour nous qui achetons du blé exempt de ces charges.

— Si l’on vous dit : Les serfs de Pologne travaillent sans salaire.

Répondez : Le malheur est pour eux et le profit pour nous, puisque leur travail est déduit du prix du blé que leurs maîtres nous vendent.

— Enfin, si l’on vous dit : Les autres nations ont sur nous une foule d’avantages.

Répondez : Par l’échange, elles sont bien forcées de nous y faire participer.

— Si l’on vous dit : Avec la liberté, nous allons être inondés de pain, de bœuf à la mode, de houille et de paletots.

Répondez : Nous n’aurons ni faim ni froid.

— Si l’on vous dit : Avec quoi paierons-nous ?

Répondez : Que cela ne vous inquiète pas. Si nous sommes inondés, c’est que nous aurons pu payer, et si nous ne pouvons pas payer, nous ne serons pas inondés.

— Si l’on vous dit : J’admettrais le libre-échange, si l’étranger, en nous portant un produit, nous en prenait un autre ; mais il emportera notre numéraire.

Répondez : Le numéraire, pas plus que le café, ne pousse dans les champs de la Beauce, et ne sort des ateliers d’Elbeuf. Pour nous, payer l’étranger avec du numéraire, c’est comme le payer avec du café.

— Si l’on vous dit : Mangez de la viande.