Page:Œuvres complètes de H. de Balzac, IV.djvu/411

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

m’être assuré de pouvoir vous laisser dans toute votre liberté. Votre fierté solitaire s’est exagéré les difficultés ; vous pourrez assister à la vie d’un frère ou d’un père sans souffrance et sans joie si vous le voulez ; mais vous ne trouverez autour de vous ni raillerie ni indifférence, ni doute sur les intentions. La chaleur de l’atmosphère où vous vivrez sera toujours égale et douce, sans tempêtes, sans un grain possible. Si, plus tard, après avoir acquis la certitude d’être chez vous comme vous êtes dans votre pavillon, vous voulez y introduire d’autres éléments de bonheur, des plaisirs, des distractions, vous en élargirez le cercle à votre gré. La tendresse d’une mère n’a ni dédain ni pitié ; qu’est-elle ? l’amour sans le désir ; eh bien ! chez moi, l’admiration cachera tous les sentiments où vous voudriez voir des offenses. Nous pouvons ainsi nous trouver nobles tous deux à côté l’un de l’autre. Chez vous, la bienveillance d’une sœur, l’esprit caressant d’une amie peuvent satisfaire l’ambition de celui qui veut être votre compagnon, et vous pourrez mesurer sa tendresse aux efforts qu’il fera pour vous la cacher. Nous n’aurons ni l’un ni l’autre la jalousie de notre passé, car nous pouvons nous reconnaître à l’un et à l’autre assez d’esprit pour ne voir qu’en avant de nous. Donc, vous voilà chez vous, dans votre hôtel, tout ce que vous êtes rue Saint-Maur : inviolable, solitaire, occupée à votre gré, vous conduisant par vos propres lois ; mais vous avez en plus une protection légitime que vous obligez en ce moment aux travaux de l’amour le plus chevaleresque, et la considération qui donne tant de lustre aux femmes, et la fortune qui vous permet d’accomplir tant de bonnes œuvres. Honorine, quand vous voudrez une absolution inutile, vous la viendrez demander ; elle ne vous sera imposée ni par l’Église ni par le Code ; elle dépendra de votre fierté, de votre propre mouvement. Ma femme pouvait avoir à redouter tout ce qui vous effraie ; mais non l’amie et la sœur envers qui je suis tenu de déployer les façons et les recherches de la politesse. Vous voir heureuse suffit à mon bonheur, je l’ai prouvé pendant ces sept années. Ah ! les garanties de ma parole, Honorine, sont dans toutes les fleurs que vous avez faites, précieusement gardées, arrosées de mes larmes et qui sont, comme les quipos des Péruviens, une histoire de nos douleurs. Si ce pacte secret ne vous convenait pas, mon enfant, j’ai prié le saint homme qui se charge de cette lettre de ne pas dire un mot en ma faveur. Je ne