Page:Œuvres complètes de Maximilien de Robespierre, tome 1.djvu/131

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qu’ils veuillent cueillir se fanent dès qu’ils les ont touchées ; elles ne conservent un éclat immortel qu’entre les mains de ce petit nombre d’Écrivains fortunés que la nature a doués d’un génie vraiment original.

Le premier ouvrage qui fit connoitre Gresset dans la République des Lettres le plaça incontestablement dans cette classe privilégiée. Ici, Messieurs, l’idée du Ververt se présente d’elles-même à vos esprits. À ce nom, un souris involontaire semble naître, excité par les images charmantes qu’il réveille dans notre mémoire ; et c’est-là, sans doute, le plus bel éloge d’un ouvrage de ce genre.

Cette production parut, comme un phénomène littéraire. Avant cette époque, nous possédions plusieurs Poëmes héroï-comiques justement admirés ; et, par un contraste assez singulier, c’est aux plus imposans et aux plus graves d’entre les Poëtes, que nous devons ces productions badines. Le chantre d’Achille ne dédaigna pas de célébrer la guerre des rats et des grenouilles. Pope, ce Poëte philosophe, trouva dans une boucle de cheveux la matière d’une nouvelle Iliade. Boileau, le poëte de la raison, emboucha la trompette héroïque pour chanter la discorde qu’un Lutrin avoit allumée dans le sein d’une paisible Église.

Tous les siècles réunis n’avoient produit que quatre ou cinq chefs-d’œuvres en ce genre, et notre langue n’en possédoit qu’un seul, lorsqu’un jeune Poëte, inconnu jusqu’alors, sembla les surpasser tous par un ouvrage encore plus étonnant.

Sa muse osa franchir les grilles des Couvens, pour y observer ces riens importants nés de la frivolité du sexe. Cette matière neuve, mais aride, prêtoit, sans doute, beaucoup moins à l’imagination que celle du Lutrin et de la Boucle de Cheveux enlevée.

Pope et Boileau avoient d’ailleurs étendu les ressources de leurs sujets : le premier, par l’intervention des Silphes, qu’il intéresse à la destinée des cheveux de Bélise ; l’autre, par l’introduction des Divinités allégoriques auxquelles il