Page:Œuvres de Blaise Pascal, IV.djvu/140

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lonté d’aimer ce qu’elle sçait qui la rend malheureuse ; que ces deux puissances donc sont libres, et que c’est par elles que nous pouvons nous rendre parfaicts ; que l’homme peut par ces puissances parfaictement connoistre Dieu, l’aimer, luy obeïr, luy plaire, se guerir de tous ses vices, acquerir toutes les vertus, se rendre saint ainsi et compagnon de Dieu 1 . Ces principes d’une superbe diabolique le conduisent à d’autres erreurs, comme : que l’ame est une portion de la substance divine 2 ; que la douleur et la mort ne sont pas des maux 3 ; qu’on peut se tuer

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1. Propos, liv. I, ch. 14, p. 74 : « Nos ames ont une si estroite union et conjonction avec Dieu, qu’elles sont comme particules et abstractions de son essence. Comment donc ne sentiroit-il pas tout leur mouvement, comme luy estant propre et connaturel ? Et vous mesme, pouvez vous pas embrasser en vostre esprit une infinité de choses, et du gouvernement du monde et des affaires, tant de Dieu que des hommes. » — Ibid, liv. II, ch. 14, p. 225 : « Il faut apprendre quel est Dieu : Car tel qu’il se trouvera estre, il faut par necessité que celuy qui veut luy plaire et obeir, tasche de tout son pouvoir de luy ressembler. Si Dieu est fidele, il doibt estre fidele.... : bref dire et faire toutes choses, comme imitateur de Dieu, » — Ibid., ch. 23, p. 299 : « Mais qui peut empescher la volonté? Il n’y a rien qui ne soit subjet à la volonté, mais elle-mesme se change et pervertit. Et pour ce elle seule est cause du vice, ou de la vertu. » — Ibid., ch. 8, p. 190 : « Vous estes une creature principale, vous estes une extraction de Dieu, vous avez en vous mesme une particule de luy. Pourquoy donc mesconnoissez-vous vostre noblesse.... ? Quand vous conversez, quand vous vous exercez, quand vous parlez, ne sçavez-vous pas que c’est Dieu que vous nourrissez, que c’est Dieu que vous exercez. Miserable, vous portez Dieu avec vous, et vous l’ignorez ! »

2. Cf. les passages cités dans la note I ; voir aussi Propos, liv. I. ch. I, p. 5 : « Mais puisque je n’ay peu faire cela pour toy, je t’ay donné au lieu une petite portion de nous mesme, cette puissance qui est en toy de desirer et de fuïr, de se porter à l’action, ou de s’en deporter. » (En marge, se trouve cette note du traducteur : « Erreur des Stoïques, qui croyoient que l’ame fust une particule de l’essence de Dieu. »)

3. Manuel, ch. 5 : « Si donc vous ne fuyez que ce qui est naturel-