Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/32

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avaient peut-être vu la marche imposante des armées romaines, déployaient leurs rameaux noueux et larges sur un épais tapis formé de la plus gracieuse verdure ; en quelques endroits s’élevaient entre eux des bouleaux, des houx et des bois taillis de différentes espèces, tellement rapprochés que leurs branches s’entrelaçant interceptaient presque totalement les rayons du soleil couchant ; en d’autres lieux, ces arbres, isolés les uns des autres, formaient de longues avenues dans les détours desquelles la vue se plaît à s’égarer, tandis que l’imagination les regarde comme des sentiers conduisant à des sites plus sauvages, et à des solitudes encore plus profondes. Ici, les rayons pourprés de l’astre bienfaiteur lançaient des feux plus ternes qui s’inclinaient sur les rameaux brisés et sur les troncs moussus des arbres, et là ils éclairaient de flammes brillantes la pelouse sur laquelle elles se réfléchissaient après s’être frayé un passage entre les clairières. Un grand espace ouvert au milieu de celles-ci paraissait avoir été jadis consacré au culte des druides ; car sur le sommet d’une petite colline, si régulière qu’elle semblait un ouvrage de l’art, se voyaient les débris d’un cercle de pierres informes et d’une dimension extraordinaire[1]. Sept de ces pierres étaient encore debout ; les autres avaient été déplacées vraisemblablement par le zèle de quelques convertis au christianisme, et se trouvaient peu éloignées du lieu où elles gisaient d’abord ; il y en avait de renversées sur le penchant de la colline. Une seule des plus larges avait été entraînée jusqu’au bas, et, suspendant le cours d’un petit ruisseau qui s’écoulait au pied de l’éminence, occasionnait par son obstacle un doux murmure à l’onde limpide, auparavant silencieuse.

Deux figures humaines qui complétaient ce paysage participaient, dans leur extérieur et leur costume, de ce caractère sauvage et rustique appartenant alors aux habitans des terres boisées du West-Riding, et du comté d’York.

Le plus âgé avait un aspect dur, farouche et grossier ; son habillement, qui était de la forme la plus commune et la plus simple, consistait en une jaquette serrée à manches, faite de la peau tannée de quelque animal, à laquelle on avait primitivement laissé le poil, mais qui se trouvait usé en tant d’endroits, qu’il eût été difficile de distinguer sur les débris qu’on en voyait encore à quel quadrupède il avait appartenu. Ce vêtement descendait du cou au

  1. Quatre grandes pierres de ce genre composaient les autels des druides ; trois étaient placées de côté comme trois angles, et la quatrième par dessus. a. m.