Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/76

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wold, et, invitant ce dernier à attendre qu’elle revînt, fit signe à l’inconnu de la suivre. Apparemment ne jugea-t-il pas convenable de décliner cette invitation comme la première ; car, bien que son geste montrât qu’il éprouvait quelque surprise à de tels ordres, il obéit sans rien répondre.

Pour arriver à lady Rowena, il fallait traverser un petit corridor et monter sept marches qui n’étaient autres que des poutres de chêne solides et massives ; la sauvage magnificence de ce séjour s’accordait bien avec le respect dont était pénétré pour la jeune saxonne le noble seigneur du manoir. Les murs de l’appartement étaient couverts de tapisseries brodées qui, au moyen de diverses espèces de soie entremêlées de fils d’or et d’argent, représentaient, avec tout l’art dont étaient susceptibles ces temps reculés, des chasses au lévrier et au faucon. Le lit était orné de cette riche tapisserie et entouré de rideaux teints en pourpre. Les sièges étaient aussi recouverts d’une étoffe coloriée, et l’un d’eux, plus élevé que les autres, avait un marchepied d’ivoire artistement ciselé.

Quatre candélabres d’argent, supportant des bougies en cire, servaient à éclairer ce lieu ; mais, hâtons-nous de le dire, qu’aucune de nos modernes beautés ne porte envie à la magnificence de la princesse saxonne. Les murs de l’appartement avaient été si mal finis, et se trouvaient alors tellement lézardés que la riche tapisserie dont ils étaient couverts remuait au moindre souffle, et, en dépit d’une sorte de paravent destiné à les protéger, la flamme des torches vacillait dans l’air comme le plumet sur la toque du chieftain[1]. Ici tout paraissait magnificence avec une grossière prétention à montrer quelque goût ; mais ce qu’on appelle les commodités de la vie domestique, ou le confortable, y manquait presque entièrement, parce qu’il était encore inconnu.

Lady Rowena, avec trois de ses suivantes qui se tenaient derrière elle et qui arrangeaient sa chevelure pour la nuit, était assise sur l’espèce de trône déjà mentionné, et regardait autour d’elle comme une reine qui attend d’universels hommages. Le pèlerin connaissait ses droits, et il y paya tribut par une profonde génuflexion. « Levez-vous, pèlerin, lui dit-elle avec grâce ; celui qui prend la défense de l’absent a droit au bon accueil de quiconque chérit la vérité et honore la valeur. Retirez-vous, dit-elle à ses suivantes, excepté Elgitha, je voudrais parler avec ce saint voyageur. » Les jeunes filles, sans quitter l’appartement, allèrent se placer dans

  1. Capitaine ou chef de clans ou paysans de la Vieille-Écosse. a. m.