LES FIANCÉS
CHAPITRE PREMIER.
le prince gallois amoureux.
Les chroniques d’où ce récit a été tiré nous assurent que, durant la longue période où les princes du pays de Galles soutinrent leur indépendance, l’année 1187 fut surtout remarquable par le traité de paix conclu entre ces princes et leurs belliqueux voisins, les lords Marchers[1], qui occupaient sur les frontières des anciens Bretons ces châteaux formidables et inhabités dont le voyageur contemple encore les ruines avec un sentiment d’admiration. Ce fut à cette époque que Baudouin[2], archevêque de Cantorbéry, accompagné de Gérald de Barri, depuis évêque de Saint-David, prêchait la croisade de château en château et de ville en ville, et parcourut les vallées les plus solitaires de la Cambrie, son pays natal, appelant aux armes les habitants pour la délivrance du Saint-Sépulcre. Si d’un côté Baudouin cherchait à apaiser les querelles et les guerres des chrétiens entre eux ; d’un autre il offrait à l’esprit martial de son siècle un objet général d’ambition, un théâtre d’aventures où la faveur du ciel aussi bien que la renommée terrestre devaient être le prix accordé aux champions victorieux.
Cependant de tous les chefs que cet esprit de vertige entraînait loin de leur patrie, vers un climat lointain et dangereux, les capitaines bretons étaient peut-être ceux qui pouvaient le plus facilement s’excuser de répondre à l’appel général ; car ils étaient constamment inquiétés par les chevaliers anglo-normands, qui déployaient une adresse extraordinaire dans leurs fréquentes in-