Panthéon égyptien/16

La bibliothèque libre.
Panthéon égyptien, collection des personnages mythologiques de l'ancienne Égypte, d'après les monuments
Firmin Didot (p. 35-36).

NÉITH MOTRICE ET CONSERVATRICE.

(athénè, minerve.)
Planche 6 quinquies (A)

L’artiste égyptien, en représentant le déesse Néith mâle et femelle, à trois têtes, et à pieds de lion[1], conformément au texte des livres sacrés de l’Égypte, a montré réunies comme en un seul corps toutes les formes sensibles sous lesquelles la Mère divine, c’est-à-dire, l’Athénè Αιολόμορφος des hymnes orphiques, était offerte à la vénération des peuples. Chacune des attributions diverses de ce grand être cosmogonique est ainsi caractérisée par un symbole particulier dont le sens était bien fixé ; tous ces emblèmes, liés les uns aux autres, formaient donc une image panthée de la déesse, considérée dans la totalité et dans la plénitude des pouvoirs divers que la doctrine théologique lui avait assignés. Néith fut à la fois le symbole du principe femelle, le principe maternel de l’univers, la sagesse divine inventrice des sciences et des arts de la paix ; la sagesse qui donne la victoire ; la force qui meut et conserve la nature, suite la divinité protectrice des guerriers, ainsi que l’Athénè grecque, copie fidèle de la Minerve égyptienne, dont le culte fut porté des bords du Nil aux rivages de l’Attique.

La planche 6 représente Néith sous son apparence la plus habituelle : une femme ailée, assise, et coiffée du pschent placé sur la dépouille d’un vautour. C’est Néith, adorée comme principe femelle de l’univers entier. Elle porte alors nom de Grande mère ou Mère divine : cette forme simple est facile à retrouver dans l’image complexe de Néith-Panthée[2].

Considérée d’une manière moins générale, comme mère des êtres vivants et protectrice de l’enfantement, Néith, qui prenait alors le nom de Swan, comme on le verra dans la suite, était figurée sous les apparences d’une femme à tête de vautour : la tête de cet oiseau, emblème de la maternité, est en effet la troisième tête de la Néith-Panthée.

Adorée comme inventrice des arts et des sciences, cette grande déesse, et par prenant alors le nom de Nat ou Nêth, dont les Grecs ont fait Νηΐθ, était représentée sous la forme d’une femme assise, coiffée de la partie inférieure du pschent. On la nommait aussi Bouto. Les hymnes orphiques donnent à Athénè ou Minerve, considérée sous ce point de vue, les qualifications de τεχνῶν μῆτερ πολύολβε et de εὑρεσίτεχνε, mère féconde des arts et inventrice des arts[3].

La seconde tête de la Néith-Panthée est celle d’une lionne, parce qu’on figurait cette divinité sous la forme d’une femme léontocéphale, pour la présenter à l’esprit sous l’une de ses plus importantes attributions. C’était Néith devenant le symbole de la force morale et de la force physique ; ou, comme nous l’apprend Proclus[4], citant l’opinion même des Égyptiens, la puissance qui met l’univers entier en mouvement, ἡ κινητικὴ τοῦ παντὸς δύναμις. Néith reçoit alors le nom de Déesse gardienne ou conservatrice, que l’on trouvera avec la forme hiératique sur la planche ci-jointe, représentant la déesse léontocéphale.

On ne peut méconnaître dans cette forme de l’Athénè égyptienne, la dispensatrice de la force, la déesse des guerriers, le type de l’Athénè grecque Πολεμοκλόος et Ὁπλοχαρής[5].


Notes
  1. Voy. ci-dessus, planche 6 ter.
  2. Planche 6 ter.
  3. Hymne à Athénè, vers 8 et 17.
  4. Proclus in Timæum, liv. I.
  5. Hymnes orphiques, édit. d’Hermann ; hymn. XXI.

——— Planche 6 quinquies (A) ———