Pleureuses/18

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Le sourire (1895)
PleureusesErnest Flammarion (p. 71-72).


LE SOURIRE


Le sourire c’est ce qu’on donne.


Ma sœur, quand tu souris, on croit
Que c’est ton âme sur la terre…
Mais pour moi, c’est le grand mystère
Qui m’éblouit au seuil de toi !

Pourtant, ton rire de lumière
Restera notre pureté.
Ce sera dans l’éternité
Notre vague et pauvre prière.


Notre prière et notre foi,
Et ton regard dans notre église ;
Ce sera l’image précise
De ta bouche qui pense à moi.

Après toute métamorphose,
Lorsque le soir sera l'oubli,
Je verrai ton rire pâli
Rester comme la seule chose.

Jusqu’au moment assoupissant
Où calme à tes mains disparues,
Dans le vieux rêve de nos rues,
Je passerai comme un passant.