Poème de la prison/Ballade LXV

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Poésies complètes, Texte établi par Charles d’HéricaultErnest Flammarion (p. 84-85).

BALLADE LXV.

     Plaisant Beauté mon cueur nasvra,
Jà pieçà, si tresdurement
Qu’en la fievre d’Amours entra,
Qui l’a tenu moult asprement ;
Mais, de nouvel, presentement,
Ung bon médecin qu’on appelle
Non Chaloir, que tiens pour amy.
M’a guery, la sienne mercy,
Se la playe ne renouvelle.
     Quant mon cueur tout sain se trouva,
Il l’en mercia grandement
Et humblement lui demanda
S’en santé seroit longuement ?
Il respondy tressagement :
« Mais que gardes bien ta fourcelle
Du vent d’Amours qui te fery,
Tu es en bon point jusqu’à cy,
Se la playe ne renouvelle.
     L’embusche de Plaisir entra
Parmy tes yeulx soutivement ;
Jeunesse le mal pourchassa,

Qui t’avoit en gouvernement
Et puis bouta privéement
Dedans ton logis l’estincelle
D’Ardant Désir qui tout ardy ;
Lors fus nasvré, or t’ay guery,
Se la playe ne renouvelle.