Poème de la prison/Ballade X

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Poésies complètes, Texte établi par Charles d’HéricaultErnest Flammarion (p. 24-25).
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BALLADE X.

     À ma Dame je ne sçay que je dye,
Ne par quel bout je doye commencer,
Pour vous mander la doloreuse vie
Qu’Amour me fait chascun jour endurer.
Trop mieulx vaulsist me taire que parler,
Car proufiter ne me pevent mes plains,
Ne je ne puis guerison recouvrer,
Puisqu’ainsi est que de vous suis loingtains.
     Quanque je voy me desplaist et ennuye,
Et n’en ose contenance monstrer,
Mais ma bouche fait semblant qu’elle rie,
Quant maintefois je sens mon cueur plourer.
Au fort, martir on me devra nommer,
Se Dieu d’Amours fait nulz amoureux Saints,
Car j’ay des maulx plus que ne sçay compter,
Puisqu’ainsi est que de vous suis loingtains.
     Et non pourtant, humblement vous mercie,
Car par escript vous a pleu me donner
Ung doulx confort que j’ay à chiere lie

Receu de cueur et de joyeux penser,
Vous suppliant que ne vueilliez changier,
Car en vous sont tous mes plaisirs mondains
Desquelz me fault à présent deporter,
Puisqu’ainsi est que de vous suis loingtains.