Poésies (1820)/Romances/À un Trompeur

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PoésiesFrançois Louis (p. 113-114).
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À UN TROMPEUR.


Tes mépris, ton inconstance,
Ne feront plus ma douleur ;
À ta trompeuse éloquence
L’Amour a fermé mon cœur ;
Un soupir, un regard tendre,
Avaient pour moi plus d’appas ;
Et je savais mieux t’entendre
Quand tu ne me parlais pas.

Lorsque ta paupière humide
Sur mes yeux vint s’adoucir ;
Quand ta bouche, encor timide,
Trahit ton premier soupir ;
Je frémis comme la feuille
Que caresse le zéphyr,
Et qui doucement recueille
Le baiser qu’il semble offrir.


Quand tu peignais la tendresse,
L’amour, la crainte ou l’espoir,
De plaisir ou de tristesse
Je me sentais émouvoir ;
Et ces accens pleins de flamme,
Par un prestige enchanteur,
Semblaient sortir de ton âme
Pour se graver dans mon cœur.

Mais que cette âme insensible
M’échappe enfin sans retour !
La mienne est déjà paisible ;
Elle attend un autre amour…
Que dis-je ? ah ! s’il faut te craindre,
Sauras-tu moins me charmer ?
Non ! Je veux apprendre à feindre,
Et je n’apprends qu’à t’aimer.