L’amour, comme un doux visiteur
Qui s’insinue et qui se glisse,
L’amour, comme un doux visiteur
Entre parfois dans notre cœur
Pour sa joie… et pour son supplice.
Il semble timide et discret,
Il met aux mots une sourdine…
Il semble timide et discret,
Mais il tend d’invisibles rets
De sa main sûre, adroite et fine ;
Il parle… Sa voix, tour à tour,
Caresse, pleure, rit et chante ;
Il parle… Sa voix, tour à tour
Voix de cristal, voix de velours,
Est impérieuse et touchante.
D’abord chaste et quasi lointain,
Il a de séduisantes grâces ;
D’abord chaste et quasi lointain,
Le doux visiteur clandestin
Tout à coup ose des audaces ;
Et notre cœur, dans ses filets
Trop prisonnier pour se défendre,
Et notre cœur, dans ses filets
Laisse faire autant qu’il lui plaît
L’amour impitoyable et tendre !…
Comme l’enfant tenant les fils
D’un vague pantin qui voltige,
Comme l’enfant tenant les fils
Il sait, de ses doigts puérils,
Mener nos cœurs pris de vertige…
Hélas ! l’amour est un tyran,
Il les fait valser à sa guise ;
Hélas ! l’amour est un tyran,
Et tous les pauvres cœurs qu’il prend
Il les unit, — puis les divise ; —
Et sans doute est-ce un jeu divin :
Semer l’espoir, semer la joie…
Et sans doute est-ce un jeu divin
Que de faucher ces bonheurs vains
Comme une herbe que le vent ploie !…
— Amour, pourquoi tant de tourmens,
Tant de désirs et tant d’angoisses ?
Amour, pourquoi tant de tourmens
À ces cœurs pris naïvement
Dans la main fine qui les froisse ?
Pourquoi donc, après s’être aimé
D’un amour fait de mille trames,
Pourquoi donc, après s’être aimé,
Voir l’indifférence germer
Soudain, d’une nuance d’âmes ?…
Pourquoi, oui, pourquoi sans pitié
Briser tout ce que tu nous donnes ?
Pourquoi, oui, pourquoi sans pitié
Nous laisser nus plus qu’à moitié,
Tels des bois dans le vent d’automne ?…
Ah ! visiteur, doux visiteur
Vêtu de ruses et de charmes,
Ah ! visiteur, doux visiteur,
En paix veut reposer mon cœur
Qui n’est point fait pour tant de larmes ;
Il sait quelle est ta dure loi,
Il te craint d’être jeune et tendre…
Il sait quelle est ta dure loi,
Et que tu laisses après toi
De l’amertume et de la cendre.
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